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Pour la sauvegarde des intérêts des commandants
et du danger de vouloir défendre ceux de leur société !
Ce rapport pour qu'on ne vienne pas dire, lors d'un incident, qu'un
commandant affabule s'il affirme que l'attitude du pilote a été à l'opposé de ce qu'elle aurait dû être . On saura qu'il y a eu des
antécédents.
Dans le port (A) sur le navire (B) lors de mon précédent embarquement début 1999. Navire accosté
tribord à quai. Aucun navire ni devant ni derrière. Vent force 2 à 3 légèrement par l'arrière du travers bâbord. Pas demandé de
remorqueur pour l'appareillage.
Le pilote monte à bord et je lui indique que je n'ai pas demande de remorqueur. Il m'incite
fortement à en prendre un car ce n'est pas prudent. Je persiste à refuser l'emploi d'un remorqueur étant données les conditions météorologiques et
géographiques et pour minimiser les frais d'escale.
Le pilote se met alors presque en colère en disant que à force de jouer avec le feu on finit par
se brûler, faisant valoir que l'armateur ne m'en sera nullement reconnaissant, et en me disant que quand on a besoin des remorqueurs
on est bien content de les trouver et qu'il ne faut donc pas les négliger autrement.
Décostage classique :
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Propulseur avant toute à gauche pour écarter l'avant. Barre à droite toute et en avant lente pour écarter l'arrière.
Alors que l'arrière commençait à décoster, mais ne l'était pas encore suffisamment, le pilote fait stopper la machine et
mettre la barre à zéro sans raison.
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Résultat :
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Le temps que le propulseur, que je stoppe moi-même sans indication du pilote, revienne au pas zéro (il est très lent) et
également sous l'action du vent faible mais accostant, le cul revient sur le quai et le pilote ne réagit pas.
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Sentant la très mauvaise volonté du pilote et son désir de me faire peur, je ne fais rien
(j'aurais bien entendu été à la limite du raisonnable pour la sécurité du navire).
Le cul du navire finit par commencer à surplomber le quai. Si rien n'est fait il va y avoir un
problème. Réalisant qu'il n'en sortira pas sans responsabilité, étant données les conditions clémentes il aurait difficilement pu
expliquer la manœuvre ratée même sans remorqueur, le pilote fait mettre en avant demi sans s'assurer que l'hélice est claire et le
cul s'écarte du quai puisque le navire prend de l'erre.
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Nous arrivons devant l'écluse, abattons sur bâbord pour pouvoir entrer. Dans
l'écluse, il y a déjà un navire accosté en position Nº1. Nous devons aller en position Nº2. Le vent, traversier au quai
de départ, est par conséquent, presque dans l'axe de l'écluse. Malgré ma remarque que notre vitesse me semble excessive
(plus de 3,5nds) le pilote ne stoppe pas la machine et me répond qu'il faut bien que nous avancions.
Ce n'est qu'arrivé à moins de 50 mètres de la porte de l'écluse, et alors que les
aussières ne sont pas encore capelées à terre, que le pilote fait stopper et battre en arrière demi.
Bien sûr le navire stoppe rapidement mais en même temps sous l'effet du pas de
l'hélice, il se met en travers. Conséquence, l'arrière du navire approche le navire Nº1 à environ 2 mètres. Heureusement
j'arrive à éviter le heurt en virant sur les aussières, tardivement mais quand même capelées, le pilote restant
totalement inactif après avoir stoppé la machine.
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Commentaires du pilote :
"Je connais très bien ces navires et je sais que l'effet du pas de l'hélice est très sensible.
Vous voyez, ce qui a failli vous arriver, vous auriez, du passer votre temps à faire un rapport alors qu'avec un remorqueur vous
auriez, été tranquille. Moi, de toutes façons, je m'en moque car je préfère manœuvrer sans remorqueur" (Réflexion pour le moins
contradictoire avec ce qui a précédé).
De ces événements je pense pouvoir déduire ceci :
Si vraiment le pilote préfère manœuvrer sans remorqueur pourquoi faire tant d'histoires parce
que je ne voulais pas en prendre ?
A la place du pilote, déchargé de toute responsabilité en cas d'incident, par le refus du
commandant de prendre un remorqueur, j'aurais mis un point d'honneur à réussir parfaitement une manœuvre plus délicate.
Le pilote sachant que ce navire est sensible au pas de l'hélice aurait dû prendre ses précautions.
C'est à dire :
- Rentrer dans l'écluse à très petite vitesse, une vitesse plus faible que celle que j'ai trouvée excessive nous aurait fait
perdre au maximum 5 minutes étant donné le peu de distance à parcourir.
- Le faire légèrement sur la gauche de l'axe s'il craignait une dérive à cause du vent, quitte à mettre le propulseur à droite,
une fois entré pour rapprocher le nez du quai et l'engager dans le trou à droite du navire Nº1, en même temps, mettre
la barre à gauche avec une impulsion de la machine pour rapprocher également le cul du quai.
- Ensuite à proximité du navire Nº1 , laisser courir sur l'erre, machine stoppée, de façon à pouvoir arrêter le navire avec la
seule retenue des aussières capelées suffisamment tôt, donc pas d'effet de pas d'hélice.
Dans la manœuvre de décostage au quai de départ, le pilote aurait pu avoir une responsabilité en
cas d'incident, c'est pourquoi il a réagi et abandonné sa manœuvre d'intimidation.
Dans la manœuvre de mise à poste dans l'écluse il aurait pu sortir blanc comme neige faisant
valoir qu'il lui avait bien fallu battre en arrière pour stopper le navire et que si ce dernier avait heurté le navire Nº1, c'est
parce qu'il n'avait pas de remorqueur pour nous retenir, or il m'avait fortement conseillé d'en prendre un. C'est pourquoi il a
persisté dans sa manœuvre malgré mes remarques sur la vitesse à mon avis excessive qu'il aurait pu justifier par le fait que d'autres
navires attendaient leur tour pour rentrer. M'ayant affirmé qu'il connaissait très bien les caractéristiques du navire il aurait du
faire passer la sécurité avant.
Je reste convaincu que la prise d'un remorqueur n'était pas nécessaire. La preuve c'est que nous
avons pu faire la manœuvre sans qu'un incident survienne- et malgré les tentatives du pilote pour en provoquer un.
Je reste également persuadé, étant donné les attitudes, intonations, regards et non regards, et
j'en ai après coup, l'intime conviction, comme le veut la formule, que le pilote a tout fait pour provoquer un incident sans trop de
gravité et pour lequel il n'aurait pu être inquiété et tout ceci rien que pour me prouver que j'avais eu tort de ne pas suivre son
avis.
Pourquoi je n'ai pas réagi plus catégoriquement ?
Tout simplement parce que j'ai très nettement senti que plus j'en ferais, plus lui aussi en
ferait et franchement je ne pensais pas qu'il aurait été jusqu'au bout de ses desseins (plus d'une fois j'ai eu des désaccords avec
certains pilotes mais toujours cela s'est arrêté au verbal, le pilote ayant ensuite à cœur de faire son métier correctement).
Un pilote est censé embarquer pour conseiller (je dis bien conseiller comme le veut la
réglementation. Il y aurait aussi beaucoup à dire sur ce problème, mais là n'est pas notre propos), donc conseiller un commandant et
éviter les incidents au lieu de chercher à les provoquer ce qui est quand même un comble. Même si le commandant ne semble pas
coopératif, c'est quand même lui le responsable en cas d'incidents. Le pilote, même s'il n'est pas d'accord, doit donc tout faire pour
que tout se passe bien. C'est là, la raison de sa présence.
Cdt Wanherdrick
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