La population de notre pays s'indigne, a juste raison, des pollutions par rejets d'hydrocarbures en mer.
Le but de l'association française des capitaines de navires (AFCAN) étant de promouvoir la
sécurité en mer et par voie de conséquence la protection de l'environnement, nous partageons cette
indignation. Les pollueurs doivent être poursuivis. Et les peines prévues par la loi doivent être telles
qu'elles découragent l'éventuel pollueur.
Nous ne pouvons donc qu'être d'accord avec la démarche des députés qui ont voulu reformer la loi
du 5 juillet 1983, estimant que celle-ci ne joue pas, dans sa rédaction actuelle, le rôle préventif qui
devrait être la sienne. Nous devons malheureusement constater que le texte adopte par les députés le
13 juin n'apportera aucune amélioration.
En effet ce texte se contente de multiplier par trois l'amende, et de doubler la peine de prison,
applicable au capitaine du navire qui a pollué. Or, comme nous le montrons dans la note technique ci-
après, les pollutions dites volontaires sont rarement dues au seul choix du capitaine.
L'AFCAN pense que la loi française doit prendre en compte tous les intervenants responsables
qui, par leurs choix ou leurs négligences, sont à l'origine d'une pollution.
Une loi doit faire la différence entre une faute volontaire ou involontaire. Une annexe de "MARPOL"
fait la différence : "Si la pollution est due à une avarie imprévisible et que tout a été fait pour réparer et
pallier le rejet, le rejet n'est pas délictueux".
La loi française présentée actuellement ne peut concerner que les navires français ou les navires
se trouvant dans les eaux territoriales françaises. Un capitaine étranger hors des eaux territoriales
demandera l'application de la Convention MARPOL.
Nous considérons que les amendes de 3MF sont hors de proportion avec les moyens dont
disposent les capitaines.
Nous suggérons de donner aux autorités du Mémorandum de Paris des moyens de contrôle et de
répression par l'examen des "Registres d'hydrocarbures Machine" afin que leurs procès-verbaux soient
inattaquables devant les tribunaux et permettant ainsi condamnation.
Nous souhaiterions que des listes des professionnels portuaires aptes à réceptionner les résidus
soient largement diffusées ainsi que les tarifs pratiqués.
Nous nous posons les questions : "Comment les autorités françaises ont-elles l'intention
d'informer nos collègues étrangers des risques qu'ils encourent ?" et " Les magistrats français recevront-
ils un jour une formation leur permettant de traiter avec efficacité et réalisme ce type de dossier ?"
Ci dessous le document remis aux sénateurs :
Quelles sont les pollutions ?
- les pollutions provenant de la cargaison (chimiques ou hydrocarbures)
- les résidus d'hydrocarbures utilisés pour la propulsion de tous les navires.
- CHIMIQUES :
Les navires doivent pouvoir refouler les résidus de nettoyage à terre … c'est
rarement prévu.
- HYDROCARBURES :
- Des pétroliers : provenant de la cargaison de brut (nettoyage des cuves)
- Normalement avec les navires à double coque, qui ont des surfaces lisses, il n'y a
pratiquement pas de résidus. Lorsque pour une raison ou une autre le navire doit nettoyer ses cuves les
résidus devraient être stockés, mais ce n'est pas prévu dans les contrats d'affrètement. (C'est là que
l'affréteur a une part de responsabilité)
Pour les résidus de combustible de propulsion, ces navires sont identiques à tous les autres
navires.
- Les pétroliers anciens ont généralement l'obligation de laver les cuves qui serviront au ballast
propre. Les résidus sont stockés et décantés dans un "slop". La cargaison suivante est chargée par-
dessus. Les résidus de combustible de propulsion sont transférés dans le "slop". Normalement il n'y a
pas de rejet à la mer ou très peu.
- Des autres navires et embarcations : provenant des résidus de propulsion :
Tous les navires et embarcations à moteur ont des résidus d'hydrocarbures servant à la propulsion
(huile de vidange - filtration et centrifugation et fuites des combustibles plus ou moins lourds servant à la
propulsion). Ces résidus sont stockés dans un ballast spécialisé appelé "sludge" ou "caisse à boues".
- Sur un navire de commerce, chaque jour, une personne est chargée d'effectuer la gestion de
ces résidus (transfert et décantation de façon à diminuer le volume des résidus en éliminant un
maximum d'eau.) .Ces navires ont un " Registre des Hydrocarbures" partie Machine réglementaire sur
lequel sont consignés tous ces transferts internes, y compris le soutage. Donc on sait, en permanence,
la consommation et les quantités de résidus (de l'ordre de 1.5 à 3% selon la qualité du combustible)
- Les autres navires (petits pêcheurs et plaisanciers qui utilisent du combustible léger) ne
disposent pas de caisse de rétention de leurs eaux de cale et rejettent avec la pompe de cale les
résidus huileux à la mer s'ils ne prennent pas des dispositions pour effectuer manuellement ces
opérations au port.
Pour les petits navires une étude et des moyens appropriés devraient être élaborés.