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Les réparations de coque majeures


Notre collègue LE TOUZE nous a fait parvenir le texte suivant de Marina LERESTE



      Ce type de réparation est peu fréquent (heureusement) pendant la durée de vie du navire. Elle coïncide en général avec une période de reclassification. C'est une opération lourde, coûteuse et plus complexe qu'il n'y paraît.

  • Parties en présence

Directement :
  1. Armateur et ses représentants


  2. Société de classification


  3. Chantier



Indirectement :
  1. Assureurs


  2. État du pavillon


  • Réalisation

      Très souvent les limites de la réparation ne sont définies qu'approximativement, elles ont servi à sélectionner le chantier parmi trois ou quatre.
Le chantier choisi doit sa victoire à, bien sûr, ses prix, ses délais, sa technicité mais aussi à la position géographique du navire.
      Lorsque le navire présente toutes les garanties de sécurité pour le chantier, vient le moment de confirmer prix et délai de la réparation.
      Cela pour les pétroliers ou les minéraliers n'est raisonnablement possible qu'une fois les accès aux capacités sécurisées, c'est à dire qu'ont été effectués :
  • Le contrôle de l'atmosphère
  • La mise en place de la ventilation
  • L'établissement de l'éclairage
  • Le montage des échafaudages et accès divers
          Des nettoyages complémentaires peuvent être demandés pour obtenir le certificat de travaux à feu fourni par un expert mandaté par les autorités portuaires. Une fois ceci acquis le chantier professionnel et responsable s'engage sur une définition technique de la réparation, définition assortie d'un prix et d'un délai.
          La définition technique fait souvent l'objet de discussions entre les parties prenantes citées plus haut.

    l'armateur

    Il veut une réparation de qualité, rapide, économique, durable et bien sûr en accord avec la société de classification.

    La classification

    Il lui revient de fixer les limites des réparations :
    • décider des longueurs et des surfaces à remplacer
    • demander des contrôles supplémentaires tels que mesures d'épaisseurs...
    • demander des examens dans des capacités adjacentes
    • approuver les accès provisoires telles que brèches soudures d'appendices…..
    • contrôler l'exécution des travaux : géométrie des assemblages, qualification des soudeurs.
    • vérifier les certificats des aciers utilisés, des produits de soudage….
    • vérifier les contrôles non-destructifs réalisés sur les soudures…..


    Le chantier

    Il met en œuvre toutes les opérations citées ci-dessus. Il est in fine, qu'on le veuille ou non, l'entité déterminante qui fera que l'opération soit une réussite ou une performance moyenne... C'est au chantier et à ses contractants d'organiser les ressources humaines et matérielles pour respecter le contrat passé avec l'armateur dans le respect des normes imposées par la société de classification. Les normes appliquées en réparations de coque sont dérivées de celles en usage en constructions neuves.
    L'organisation d'une réparation conséquente de coque met en œuvre des moyens humains importants, ce qui suppose :
  • l'établissement d'une spécification technique comprenant des schémas ou plans


  • la présentation d'un planning de réalisation à l'armateur


  • des réunions de travaux régulières devant comprendre :

    • l'organisation des travaux
    • les problèmes techniques
    • les aspects sécurité
    • les objectifs des jours suivants et la confirmation du délai final

  • l'organisation des essais partiels et finaux


  • la remise d'un compte-rendu détaillé des travaux effectués comprenant position et dimensions des parties neuves, contrôles effectués…etc.…


  • la réalisation des contrôles effectués après travaux (tests d'étanchéité, contrôles non-destructifs des soudures…) avec leurs emplacements.


  • la qualification des personnels (soudeurs en particulier) et des processus.


  • la mise à disposition à toute requête de la classe ou de l'armateur des certificats matière (acier, produits de soudage…).


Le chantier exécute dans les règles le travail que lui commande son client : l'armateur. C'est en principe son seul interlocuteur, il y a un rapport client/fournisseur qui doit s'entretenir. Ce rapport dans un chantier conscient de ses responsabilités doit aussi comprendre un volet conseil : c'est sur cet aspect de la prestation que l'on constate le sérieux et le professionnalisme du chantier.


    Autres intervenants

    Assureur
    Intervient lors des avaries, ils sont directement concernés (Le règlement financier de la réparation leur revient). Pour des réparations dues à l'usure et à la vétusté les assureurs ne sont plus en première ligne.

    État du pavillon
    N'intervient pas ou peu dans une réparation majeure. Du moins pas directement, se rallie souvent pour des raisons de compétences aux décisions de la société de classification. Cependant lorsque les travaux touchent à la sécurité ou à la prévention de l'environnement, il n'est pas exceptionnel de recevoir la visite d'un inspecteur.


  • L'exécution des travaux


    Le démarrage

    Tout a été vu et approuvé sur place avec les premiers moyens mis en place. Les échafaudages se montent. Les nettoyages complémentaires sont effectués. Les brèches d'accès temporaires sont découpées… Au cours des premières réunions les plannings sont confirmés. En général tout va bien.

    Le cours (et le cœur) des travaux

    Une fois les échafaudages montés et sécurisés, la ventilation en service, l'éclairage en place, les décisions de la société de classification prises, des problèmes peuvent malgré tout se faire jour :
    • les limites des réparations décidées sur plan ou lors d'une inspection rapide doivent être étendues.
    • d'autres zones de structures que l'on croyait saines sont en fait en mauvais état.
    • les travaux limités à la spécification d'origine à la citerne X ou au ballast Y doivent en toute logique technique être étendus aux citernes ou aux ballasts voisins.
    • le montage des parties neuves provoque des contraintes dans la zone des soudures et engendre cassures ou fissures aux niveaux des structures ou bordés existants.

    Sans analyser la cause profonde de ce type d'incident lors du déroulement d'une telle opération, le chantier peut être confronté à plusieurs attitudes de la part de son client :
    • On fait ce qu'il faut et on renforce main d'œuvre et moyens techniques.
    • On discute avec la classification qui en réfère à sa direction afin de minimiser le travail supplémentaire et tenter de se trouver le plus près du délai et du budget initial.
    • Devant l'ampleur des travaux supplémentaires on arrête et on réfléchit sur le devenir du navire...
    • Plusieurs autres variantes prenant en compte une partie des 3 possibilités précédentes
    A bord d'un navire ancien (quinze ans ou plus) l'argument du ou des partisans des actions à minima est très souvent le même :
    • " On ne peut pas en faire un navire neuf "
    • " Il faut bien s'arrêter quelque part "
    • " La réparation va coûter plus cher que le navire "
    Dans une opération majeure, c'est toute la complexité de la conduite des réparations surtout que l'aide à la décision que procure le calcul en construction neuve n'est dans le domaine de la réparation que rarement présent.

    Très souvent on aboutit à un compromis, compromis qui suivant la qualité des personnes en présence tient dans certains cas, heureusement rares, plus du pari que du raisonnement.

    La fin des travaux

Bien souvent effectuée à l'arraché :
  • les échafaudeurs pressent les soudeurs.
  • Les soudeurs, corporation dont le nombre n'est pas infini enchaînent les heures supplémentaires.
  • Ces derniers sont talonnés par les contrôleurs (radios, ultrasons,
Bref une ambiance qui, si le chantier a un encadrement trop faible, peut entraîner de graves défauts qui pour certains ne peuvent apparaître qu'ultérieurement, d'où le danger.

Les actions marquant la fin des travaux :
  • enlèvement des détritus métalliques dans les capacités
  • peintures intérieures et extérieures (qui quelquefois sont trop rapidement traitées).
Des essais hydrostatiques peuvent également être demandés : remplissage des citernes en quinconce.
    Enfin avant le départ et en contrepartie du règlement du coût de la réparation, remise des plans conformes. C'est un document indispensable garantissant la bonne exécution de la réparation et assurant la traçabilité de la réparation.


  • Conclusions :

    • La bonne réalisation d'une réparation de coque majeure repose sur la compétence, l'honnêteté des 3 entités. De la cohérence des décisions prises dépend le succès de l'opération.
    • Lors des grosses opérations les contraintes mécaniques peuvent être très élevées sur la structure existante et jusqu'à plus ample informé, il n'existe pas de moyens simples et pratiques pour prédire les valeurs atteintes. Ce qui prévaut est l'expérience et le professionnalisme du trio cité plus haut.
    • Enfin, il est permis de se poser la question sur les raisons techniques et économiques qui poussent les armateurs à privilégier ce type de réparation lourde vis à vis d'un entretien régulier. C'est un autre débat qui mérite d'être ouvert.

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