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La sécurité des porte-conteneurs, Une préoccupation croissante
Intervention de l'Afcan à l'A.G. de l'Association Française du Droit Maritime à Paris
Avec le volume croissant des produits de consommation fabriqués en Extrême Orient, en Chine en particulier, les opérateurs de lignes
régulières demandent des navires de plus en plus grands. En même temps, on voit des rapports d'incidents impliquant des pertes massives
de conteneurs et des feux impressionnants qui donnent de bonnes raisons de s'inquiéter. Les porte-conteneurs vont-ils continuer à
grandir, et quelles sont les principales préoccupations auxquelles doit faire face l'industrie?
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Le navire porte-conteneurs n'a cessé de devenir de plus en plus grand depuis son introduction à la
fin des années 1950. Le plus grand navire en commande battait régulièrement le record de l'année précédente, la dernière commande de
China Shipping Container Lines and Seaspan étant pour un navire de 9200 EVP qui a été augmenté à 9600 EVP. Depuis la fin des années 50
la taille maximale a crû plus ou moins régulièrement jusqu'au début des années 90.
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L'avènement des post-panamax a accéléré le taux de croissance. C'est à peu près ce qui
s'est passé avec le développement des VLCC dans les années 70, où il semblait qu'il n'y avait pas de limite à l'augmentation
de taille. Nous savons, cependant, que le pétrolier "d'un million de tonnes" ne s'est jamais matérialisé et que le VLCC
typique s'est stabilisé au 300.000 tonnes actuel, qui semble la taille la plus courante pour les VLCC. La croissance du
porte-conteneurs va-t-elle continuer ou la courbe de croissance va-t-elle se stabiliser ?
C'est le coût unitaire par EVP mille qui est la force directrice, et c'est l'économie
d'échelle qui alimentera la croissance, mais les gains marginaux vont probablement diminuer avec l'augmentation de la
taille. Donc selon les probabilités il y a une taille optimale que les plus gros navires atteindront. De même, dans les
segments des tailles différentes, il y aura une optimisation qui s'effectuera, tout comme avec les panamax. Il y a quelques
années les plus grands panamax étaient des 4000-4500 EVP.
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Les dernières conceptions publiées par Aker Ostee peuvent transporter 5600 EVP. La superstructure est divisée en deux sections, ce qui
permet d'avoir plus de conteneurs en cale et en pontée, réduit les efforts de torsion et donne un meilleur champ de vision depuis la
passerelle.
Jusqu'où le porte-conteneur grandira-t-il? Il y a des contraintes techniques qui fixent la taille
maximum actuelle. La conception existante est un navire à une seule hélice, avec le plus gros moteur diesel fabriqué (12 cylindres),
l'alésage maximum (980 ou 960 mm), la puissance disponible est d'environ 93.000 BHP (68500 kW), ce qui donne une vitesse maximale
d'environ 24-25 nœuds, ce qui est demandé par l'industrie.
Cependant, en août 2004 on a appris qu'un moteur de 14 cylindres avait été commandé en Corée par
Odense Staalskipsvaerft. On ne sait pas encore sur quelle taille de navire il sera installé, mais des articles de presse laissent penser
que l'on franchirait la limite des 11000 EVP. Ce moteur peut délivrer environ 80.000 kW, et même s'il y a des 16 cylindres sur les
planches à dessin, on constate qu'une seule hélice ne peut supporter cette taille de moteur.
La plupart des ports autour du monde ont des limites de tirant d'eau inférieures à 14 mètres.
Actuellement le tirant d'eau d'échantillonnage est de 14,5 mètres pour un tirant d'eau en exploitation de 13-14 mètres. Le dragage et le
développement des terminaux pourront modifier cela dans l'avenir, mais dans un avenir prévisible cette limite devrait subsister.
Les gros moteurs exigent des hélices d'un diamètre proche de 10 mètres. Avec un pied de pilote pour
le fond et une marge pour le bord supérieur, la profondeur de 13-14 mètres est nécessaire pour accepter l'hélice même si les navires
sont à petite vitesse en eaux resserrées par petits fonds. En fait l'hélice pourrait être le facteur qui limite actuellement la taille
du navire.
Pour l'instant c'est la conception à hélice unique qui prévaut. L'optimisation pour les économies de
fuel peut être incompatible avec peu de vibrations et l'alternative pratique tout juste acceptable. Pourquoi alors ne pas passer à une
double propulsion ( 2 moteurs, 2 hélices) comme l'ont fait avec succès certains pétroliers à faible tirant d'eau ? Différentes sources
indiquent que l'investissement initial est de l'ordre de 10 pour cent d'une construction neuve. L'amélioration de l'efficacité de
l'hélice réduit les coûts d'exploitation mais les raisons économiques semblent toujours décourager la prise d'un tel risque. Le système
à deux lignes d'arbres offre des avantages évidents, tels que double propulsion indépendante et la possibilité de continuer sur une
hélice en cas d'urgence. C'est un argument fort si on considère que les valeurs croissante du navire et de la cargaison représentent une
augmentation de risque pour l'assurance.
La largeur des navires a été limitée par les capacités de débordement des portiques et les capacités
de levage dans les ports du monde. Jusqu'à l'arrivée des post-panamax, ce n'était pas un problème. La largeur maximale a augmenté par
étapes de 32,20 mètres à la valeur actuelle de 42,5 mètres pour la classe des 8500 EVP et à 45,80 mètres pour la classe des 9600 et plus
EVP. Les terminaux ont installé de nouveaux portiques, certains pouvant être rallongés plus tard. La capacité de levage est importante
non pour le poids maximum des conteneurs mais plutôt pour la manutention des panneaux de cale. Le poids de la pile a augmenté entraînant
logiquement une augmentation du poids du panneau. Actuellement des panneaux de tout près de 50 tonnes sont mis en place.
Des plans pour 12.000 EVP et même 16.000 EVP (malaccamax) ont été signalés dans la presse. Toute
conception au delà de la limite des 9.500-10.000 EVP exige une autre propulsion, que ce soit à avec deux hélices ou des combinaisons
avec des pods ou des hélices contra-rotatives. Cela augmente l'investissement et de ce fait compense l'attrait de l'économie d'échelle
qu'offre une plus grande taille. Si cela se produit, il y aura probablement un saut dans l'augmentation de la taille pour compenser
l'augmentation du coût initial. Avec l'exigence de fiabilité d'exploitation et de respect des horaires, ce n'est pas une surprise que
l'industrie répugne à tenter cette solution. Diverses études ont été publiées et il semble que l'alternative à deux lignes d'arbre soit
celle qui ait le plus de chance d'être adoptée. On a vu cela avec les VLCC où les restrictions de tirant d'eau ont inspiré la solution
grande largeur avec propulsion double.
Le prix à la construction pour les nouveaux grands navires est de l'ordre de 80 à 100 M US$ selon
les conditions du marché et le pays de construction. L'American Institute of Marine Insurers a soulevé le problème de l'augmentation du
risque pour l'assurance. Ils ont indiqué une valeur moyenne pour chaque conteneur (EVP) de l'ordre de 45.000 US$, ce qui met la valeur
de la cargaison à environ 430 M US$, faisant un total de l'ordre de 500 M US$ pour un type 9.600 EVP. Le rapport de la valeur de la
cargaison à celle du navire est de l'ordre de cinq. Ca fait beaucoup d'œufs dans le même panier !
Quel est donc le tableau des risques pour ces grands navires ?
Les études FSA (Formal Safety Assessment) (Evaluation formelle de la sécurité) donnent des
informations sur les dangers associés aux porte-conteneurs. Viennent en tête les dommages à la coque et à la machine suivis par les
collisions et les feux. Le coût total est estimé à 359.000 US$ par navire et par an pour un navire de 4500 EVP (taille panamax). En
transposant les statistiques des petits navires sur les nouveaux gros cela nous donne des chiffres de l'ordre de 700.000 à 800.000 US$
par navire et par an non compris la valeur de la cargaison.
Quelques un des accidents les plus marquants concernant des porte-conteneurs sont les collisions,
les feux de conteneurs, fatigue des bordés, dommages causés par impacts sur l'étrave, perte de conteneurs, roulis paramétrique et
diverses réclamations sur la cargaison, concernant souvent les conteneurs réfrigérés.
Une passerelle moderne, bien conçue, vérifiée et approuvée par la société de classification est
indispensable pour une navigation sûre. Ces navires entrent et sortent fréquemment des ports et sont souvent dans un trafic dense. La
qualification des officiers est un autre problème. En raison de l'expansion rapide du métier, les meilleurs sont très demandés. Les
simulateurs pour la formation aux plus grands navires ne seront peut-être pas disponible à temps et en nombre suffisant pour fournir la
demande. La taille elle même et l'énorme fardage de ces nouveaux navires pourraient s'avérer un défi à la fois pour les capitaines et
les pilotes.
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Les feux de conteneurs ont fait l´objet de nombreux articles de presse ces dernières
années. Des feux énormes ont entraîné l´abandon et la perte de grands navires, tels que le HANJIN PENNSYLVANIA en décembre
2003. Les feux sont souvent associés à des cargaisons sensibles telles que l´hypochlorite de calcium, un agent oxydant qui
peut s´enflammer spontanément dans certaines conditions. Eteindre de tels feux peut être un vrai problème car l´oxygène est
libéré par le produit qui brûle, ce qui contribue à l´entretien du feu. Une méthode de lutte courante contre ces feux
consiste à isoler la pile de conteneurs en feu en la noyant à l´eau pour empêcher le feu de s´étendre, et de laisser brûler
la pile jusqu´au bout. Les dégâts sont généralement considérables, comme dans le cas du CMA DJAKARTA. Le navire a eu une
cale complètement détruite par le feu, et a du être reconstruit au même prix qu´un navire neuf.
L'intégrité de la coque n'est normalement pas un problème pour les porte-conteneurs. On
ne répertorie qu'un seul accident concernant un porte conteneur qui se soit brisé en deux, il s'agit du MSC CARLA. Les
porte-conteneurs ont toujours été construits avec double flancs, double fonds et cloisons étanches.
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C'est le meilleur moyen de mettre une boîte dans les formes du
navire. Cela donne aussi une intégrité de coque de conception saine. La réglementation veut imposer la double coque aux grands pétroliers
et aux vraquiers, et cela pourra demander quelques années avant que ce soit appliqué à tous.
L'avant est une zone exposée sur les grands navires. Le dévers a continuellement augmenté pour
atteindre des valeurs bien au dessus de 45 degrés pour augmenter le nombre de conteneurs en pontée. La pontée et la taille du navire
empêchent d'observer l'avant du navire depuis la passerelle. Ceci, combiné avec la vitesse, le rend vulnérable aux avaries de coque. Ce
problème avait été remarqué par le DNV sur les gros pétroliers depuis les années 1970 et la formulation des règles a été adaptée et
modifiée avec les années pour s'assurer que l'on construisait des étraves suffisamment solides. Cependant c'est une tâche très difficile
pour l'officier de quart d'ajuster la vitesse et le cap pour préserver le navire et la cargaison tout en maintenant un horaire serré dans
des conditions météo changeantes. Avec trois opérateurs de porte-conteneurs le DNV teste actuellement une installation sur la passerelle
qui aidera le commandant dans son processus de décision. L' "Active Operator Guidance" (AOG) a pour but d'aider et de conseiller les
officiers de quart lors de la navigation par gros temps.
Le roulis paramétrique a été la cause de très lourdes pertes de conteneurs ces dernières années,
l'exemple du APL CHINA semble en être le cas classique. Le roulis paramétrique peut se produire par mer de l'avant avec une combinaison
défavorable de hauteur, de longueur et de période de vague en fonction de la longueur du navire. Des coups de roulis soudains peuvent se
produire sans préavis, entraînant les piles de conteneurs à basculer comme des dominos, produisant des pertes sévères. Une attention
plus soutenue de la part des marins semble avoir freiné le nombre des incidents l'hiver dernier. Mais plus de recherche et d'attention
portée à ce problème sont peut-être encore nécessaires. Le système AOG de DNV préviendra aussi du risque de roulis paramétrique.
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La fatigue de bordé est une avarie qui a été portée à l'attention de l'industrie ces
dernières années.
Des fissures sérieuses furent découvertes par des armateurs Allemands sur des type
panamax après quelques années seulement de service. Ce problème est bien connu en ce qui concerne les grands pétroliers et
les vraquiers mais n'avait, jusqu'à présent, pas été observé à grande échelle sur des porte-conteneurs. Bien que la cause
technique des fissures soit différente de celle des pétroliers, le remède est sensiblement le même. Avec l'utilisation
accrue des aciers à haute résistance, les problèmes de fatigue doivent être étudiés avec attention, car pour l'usage courant
que l'acier soit ordinaire ou à haute résistance la durée de vie est la même face à la fatigue. Aussi lorsque le niveau des
efforts est accru quand on utilise de l'acier à haute résistance, il faut porter une attention particulière aux détails de
structure et aux facteurs de concentration des efforts pour maintenir la même durée de vie face à la fatigue.
Les problèmes doivent être résolus au niveau de la conception. Pour les navires déjà
construits et en service, il faut calculer rétrospectivement la fatigue, un programme d'inspection doit être établi, en
faisant attention au détail avant d'arriver à la limite de fatigue. Cela permettra de préparer des budgets et des plans et
d'effectuer les réparations de manière contrôlée. L'alternative peut être l'apparition de fissures de coque qui, si elle se
produisent sur une citerne à combustible, peuvent provoquer une pollution gênante au port, entraînant une mise hors charte
immédiate et des frais de réparation. De tels incidents imprévus auront certainement un coût plus élevé que des réparations
planifiées et bien préparées.
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Même si le porte conteneur est un type de navire sûr, le développement rapide de nouvelles
conceptions plus grandes et la valeur croissante de la cargaison exigent de prendre les devants afin de traiter les dangers spécifiques
des porte conteneurs. L'industrie toute entière doit se concentrer sur ces problèmes et trouver les solutions convenables.
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