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L'invention de l'hélice




La TORTUE de Bushnell.
         Archimède, (287-212 avant JC) découvre en Egypte une pompe qui permet de monter l'eau du Nil pour irriguer les cultures, cette pompe est une vis sans fin à laquelle son nom est resté attaché. Mais Archimède ne savait pas ce qu'était une hélice, et n'a pas pensé une seconde que cette pompe pouvait servir à propulser des navires, mais c'était une jolie courbe mathématique.
Oublions donc.

       C'est en 1776 que cette vis va réapparaitre lors de la guerre d'indépendance d'Amérique pour la propulsion manuelle d'un « sous-marin » la tortue, pour porter une charge explosive sous la coque de la frégate anglaise EAGLE , cette charge n'a pu rester collée à la coque, et n'a explosé qu'une fois tombée sur le fond. Oublions donc

       En 1770, Daniel BERNOULLI , suggère la propulsion du navire par une hélice, ce que va réaliser Samuel OWEN sur la «Sorcière de Stockholm» en 1816.
On a oublié.

       En 1825, c'est Joseph RESSEL, un Autrichien, qui va utiliser une hélice à 2 pales pour propulser un bateau, le «Civitta» et un moteur de 6 CV. Il atteindra la bonne vitesse de 6 nœuds sans atteindre le succès, son moteur manquant de fiabilité, il préfère oublier et ne révélera ses essais qu'une dizaine d'années plus tard.

       Pas oublié pour tout le monde, car des marchands ayant eu connaissance des essais, déposèrent un brevet pour cette hélice, il semble qu'il n'y eut pas de suite, ne sachant quoi faire de cette invention !

       Nous arrivons enfin à Fréderic SAUVAGE, né à Boulogne sur Mer en 1786, fils d'une famille de constructeurs de navires, il est mécanicien et ingénieur. C'est la faible efficacité des roues à aubes qui le conforte dans son idée de propulsion des navires par hélices sous-marines, il en fera la démonstration en 1832 dans le vieux bassin d'Honfleur, il réitère sa démonstration sur le canal de l'Ourcq, devant une commission nommée par le ministre de la Marine, mais sans la convaincre, comprenant qu'à Paris il n'y a que des incompétents en matière de marine, il va dans un meilleur environnement

       En 1833, il fit breveter une hélice pour une durée de 15 ans, les autorités « compétentes » n'étant toujours pas convaincues de la pertinence de l'hélice.
         Sauvage travaille au Havre avec monsieur Normand, dans ses chantiers, Sauvage est le grand défenseur de la spire complète, tandis que Normand préconise le fractionnement de cette spire en 2 ou 3 parties, grande fâcherie, surtout qu'Augustin Normand va développer l'hélice avec pales tandis que Sauvage va s'entêter dans ses idées et finir ruiné, au point qu'il va être écroué pour dettes du 8 mai au 8 juillet 1843, à la prison du Havre.

Avant que la folie ne le touche, il fut fort aigri et dans sa prison écrivit ces vers :

Si l'amour du progrès vous pousse et vous anime,
Consultez-vous longtemps. Aimez-vous les tracas ?
Pourrez-vous résister à tout ce qui chagrine ?
Autrement croyez-moi, Français, n'inventez pas.

J'ai fait bien des travaux, de nombreux sacrifices,
J'ai toujours rencontré l'obstacle sans raison.
On profite aujourd'hui de mes propres hélices.
On veut m'anéantir, et je suis en prison !

Ingénieurs de nom, qui pendant douze années
M'avez fait dépenser tant de temps et d'argent,
Les hélices seraient pour toujours condamnées
Si je vous avais cru des hommes de talent.
Comme moyen de propulsion
Vous avez beaucoup fait pour changer mon système.
Qu'avez-vous démontré ? Que vous êtes des fous.
Voilà le résultat de votre envie extrême
Il me reste la gloire et la honte est pour vous.

Pourquoi faut-il en France avoir un privilège
Pour être ingénieur, ignorant ou savant ?
Le génie est-il donc un produit du collège ?
Ce don nous vient du ciel, nous l'avons en naissant.


       Après cela on verra peut-être les hélices sous un autre jour. Beaucoup ont travaillé sur l'hélice, ne laissant pas Sauvage inventeur de celle-ci.
       François MAZELINE, célèbre mécanicien dont les ateliers travaillent toujours au Havre, écrivait en 1859 : «Sauvage n'a pas été le premier qui ait songé à l'hélice comme moyen de propulsion ; les recherches et les applications faites antérieurement le prouvent assez. Ce que l'on doit à Sauvage, c'est la persévérance et les efforts qu'il a faits pour parvenir à l'application de ce propulseur».

       D'un caractère difficile, il possédait peut-être une dose d'humour quand on lui demanda pourquoi l'hélice en arrière et non en avant du bateau, il répondit sèchement : «pour la même raison, Monsieur, que les poissons n'ont pas leur queue sur leur tête»
       Il décède en 1857, et prenant conscience des mérites de Sauvage, sa ville natale de Boulogne lui élève en 1881 une statue en bronze de Lafrance sur un bas-relief de Lormier.

Cdt Y. CHARLOT



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