Notre collègue, le commandant LE CALVEZ, a présenté un exposé aux élèves observateurs aériens en stage de formation au CEDRE, afin d'expliquer la création des effluents huileux à bord des navires, les moyens et les règles de traitement et de stockage de ces produits. Cet exposé a aussi été présenté lors du séminaire sur la lutte contre les pollutions maritimes par les navires (AGIS) organisé à Brest par la Gendarmerie Maritime pour les juristes, policiers, douaniers, et gendarmes européens. |
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Les moteurs de propulsion des navires utilisent comme carburant un produit de fin de distillation de pétrole brut, inutilisable directement. Ce combustible nécessite une purification par centrifugation, afin d'éliminer l'eau et les particules abrasives constituées de métaux lourds (vanadium, nickel), de sédiments et autres. Cette opération, à charge du navire, génère environ 1% de résidus qu'il faut, soit débarquer périodiquement, soit incinérer au fur et à mesure, mais surtout de ne pas déverser par dessus bord. L'alternative logique de rendre plus simple la vie du pauvre marin, serait d'effectuer cette opération industriellement à terre, dès la sortie de raffinage. Mais malheureusement, ce résidu généré a une valeur marchande dans certains pays d'Afrique sud-saharienne et en Chine. Il intéresse très peu nos pays développés, qui préfèrent déléguer aux navires la gestion de cette marchandise indésirables. Quelques chiffres pour situer l'ordre de grandeur de la consommation des navires :
Voici le moteur B&W 7 cylindres en ligne d'un pétrolier de 300 000 tonnes, au banc de construction et d'essai dans un chantier naval au Japon, et dont les caractéristiques sont les suivantes : Puissance nominale : 30 000 ch à 82 tours par minute. Dimensions : Largeur 9.50 m, Longueur 14 m, Hauteur 17 m, poids 996 t Charge d'huile de lubrification : 30m3. La consommation moyenne d'exploitation est 90 à 100 tonnes par jour à 76 tours-minute, soit à environ 25 000 ch, et inclut la consommation des groupes électrogènes. |
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![]() photo P. Le Calvez |
PPM : Part Par Million, chiffre sans dimension, qui utilise des nombres de même nature (poids ou volume). 1ppm = 1g par tonne ou 1cm3 par m3 et non pas des grammes par mètre cube ou des cm3 par tonne. |
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Garniture de ligne d'arbre
Il arrive périodiquement à tous les navires d'avoir quelques soucis avec ce système d'étanchéité de la ligne d'arbre, suite à la capture de filets par exemple, faisant perdre en continu au navire une petite quantité d'huile.
La réparation de cette avarie à flot nécessite le remplacement de la garniture, la sortie d'eau du moyeu de ligne d'arbre, et donc le déchargement du navire combiné avec un mouvement de ballast sur le nez. Réfrigérants d'huile Des fuites causées par corrosion, ou mouvement de contrainte de structure du navire sur les réfrigérants d'huile à eau de mer peuvent être à l'origine de pertes continues ou épisodiques de lubrifiant par cet organe. |
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La manoeuvre des vannes eau de mer des ballasts est généralement hydraulique.
Sur certains navires ne disposant pas de tunnel de quille, tuyauterie et actuateurs de vannes sont situés à même les ballasts et peuvent transpirer voir fuir épisodiquement ou continuellement de huile de transmission de mouvement par corrosion, relâche de raccords, ou contraintes occasionnées par la déformation locale du travail normal de la structure du navire. Certains navires peuvent être équipés de système de pompage d'eau de ballast immergé à transmission motrice hydraulique (type FRAMO) avec mêmes inconvénients de possibilités de fuites. Avarie pouvant occasionner un rejet à la mer imprévisible, et incontrôlé de lubrifiant de transmission de mouvement, lors de la vidange complète du ballast, voir agglutiné aux boues de vase. Situation et évènement pouvant arriver à tous navires (et même aux gens biens). |
![]() photo AFCAN |
![]() photo AFCAN |
La découverte, médiatisée, l'an dernier de rejets noirâtres carbonés sur les plages du sud ouest, et donnée en premier temps comme pollution par hydrocarbure, m'avait fait penser à un voyage de Gijon en Espagne, à destination de la mer du nord sur un gazier, au cours duquel nous avions été amené à laver les ponts et superstructures après une assez longue escale dans ce port avec embarquement intempestif, vent aidant, d'une quantité remarquable de poussière de charbon du quai voisin. Cette opération généra une belle traînée noirâtre sur mer calme. |
![]() photo P. Le Calvez
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Pour avoir l'expérience du transport de pétrole brut durant les 35 dernières années, le navire gros porteur double-coque est, à ce jour, opérationnellement très écologique en comparaison des anciennes constructions à simple coque et à ballastage dans les citernes cargaison (C.B.T. Clean Ballast Tanks) et ballasts séparés (S.B.T. segregated ballast tanks). Les mouvements d'eau de mer dans les espaces cargaison des navires à double coque sont rares et exceptionnels, les possibilités de contamination de ballasts par avaries tuyauteries impossibles car il n'y a pas de passage de tuyau ballast dans la cargaison et inversement. De plus, les divers pétroles bruts sont des minerais liquides plus ou moins visqueux suivant l'origine, chargés à des températures entre 30 et 45°C. Ils sont transportés à travers la planète durant 2 à 5 semaines, et parfois déchargés dans des zones hivernales. L'échange thermique par contact de coque avec l'océan refroidit les produits qui deviennent plus pâteux, adhèrent aux parois et structures, se déposent sur les lisses, et sont parfois difficiles à pomper par température basse. Ce phénomène s'applique toujours aux S.B.T. à simple coque existants. |
![]() photo P. Le Calvez
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Les lisses et structures des navires à double coque sont principalement localisées dans les parties ballasts. Les surfaces planes des citernes à cargaison, cloisons et planchers, n'offrent plus de cachettes aux parties visqueuses, et un léger lavage au brut des fonds minimise incomparablement les résidus restant à bord en fin de déchargement. De plus la double-coque vide limite l'échange thermique avec la mer durant le voyage navire chargé. Pour exemple : Embarqué à 42°C en Arabie Saoudite, le produit est livré à plus de 30°C à St John au Canada au mois de février après 35 jours de mer par le cap de Bonne Espérance, contre 10 à 15°C en voyage simple coque . Le bémol de ces navires est l'entretien très difficile des peintures de ballasts à la mer, en raison de l'accès, du confinement, de l'humidité, de la chaleur, de l'accumulation de vase, et du temps de séchage des peintures, surtout si elles n'ont pas été parfaitement réussies à la construction. Ces peintures de ballasts sont faites au chantier naval à 98% en plein air avant montage des divers blocs. Après l'assemblage, il ne reste que les soudures à recouvrir, ceci dans de bonnes conditions. A noter : La périodicité d'arrêt pour le carénage de ces types de navires est seulement d'une dizaine de jours tous les 5 ans. |