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Propositions pratiques aux Capitaines et aux Législateurs
pour un transport maritime plus sûr pour l'environnement
Introduction
Il y a une trentaine d'années, lors d'une grande catastrophe
maritime, ce qui intéressait le grand public était la perte de marins et des biens. Les actions pour
améliorer la sécurité maritime qui en découlèrent s'orientèrent toutes vers la réduction des pertes de
vies humaines et des conséquences économiques pour les propriétaires du navire et de la cargaison.
Depuis lors, un certain nombre de catastrophes ont fait apparaître un autre sujet d'inquiétude :
l'impact d'un accident maritime sur l'environnement et sur ceux vivant de cet environnement.
Les navires qui transitent au large sont devenus une menace pour les populations côtières.
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La perte de 20 marins dans le naufrage brutal d'un
minéralier ne fait plus les gros titres que dans les journaux locaux et pour un ou deux jours.
Une pollution de 200 tonnes de pétrole ou d'un autre polluant fait la une des mêmes journaux pendant des semaines. Celle de 2000 tonnes de polluant fait
la une des journaux nationaux et télévisés. Les gouvernements, les organisations régionales, l'Organisation
Maritime Internationale et les assureurs maritimes ont commencé à prendre le problème en considération.
Toute pollution marine importante provenant d'un navire génère maintenant, au cri de "plus jamais çà !",
un flot d'idées pour protéger l'environnement. La plupart des ces idées n'arrivent pas à se concrétiser
à travers le long et difficile processus d'entérinement par les entités locales et internationales.
Des exemples nous sont donnés par plusieurs accidents tels que ceux du Nakhodka (1997), au Japon, de
l'Erika (1999) et de l'levoli Sun (2000) en France.
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Mais certaines propositions arrivent à faire leur chemin. Inconnues
du grand public, la plupart de ces propositions concrétisées ne sont pas toutes neuves : il y a longtemps
qu'on en parlait sans pouvoir les faire aboutir, et elles sont réalisées en raison du besoin d'agir à
la suite de la catastrophe.
Nouvelles on non, les idées pour "plus jamais ça" sont en général des
évolutions positives. En augmentant la sécurité de la navigation, elles contribuent réellement à
l'amélioration à long terme de la protection de l'environnement.
Parmi des exemples récents on a l'accélération de la mise à la
casse des pétroliers anciens à simple coque ou de l'amélioration des Inspections par l'État du Port
(PSC). Mais aucune proposition, quelle que soit sa valeur, ne peut garantir le "plus jamais ça".
Les accidents continueront à se produire et des améliorations supplémentaires seront nécessaires pour
que les conséquences des accidents maritimes soient moindres pour l'environnement.
Ces propositions pour des "conséquences réduites" n'auront pas de
meilleures sources qu'une bonne analyse de retour d'expérience opérationnelle des professionnels qui
vivent réellement les incidents de pollution et des études scientifiques et techniques pour résoudre
les problèmes constatés. C'est le cas des propositions présentées ici. Ce ne sont pas les
seules à présenter un intérêt. Mais les auteurs veulent démontrer qu'elles auraient eu un avantage
primordial lors d'accidents récents, et qu'elles ne coûteraient pas très cher par rapport aux conséquences
qu'elles pourraient éviter.
L'une est une base de données systématique, disponible au plan
international, gérée scientifiquement et tenue à jour, sur les routes, les tensions, les paramètres
météorologiques au cours d'opérations de remorquages d'urgence typiques, de telle sorte que les
sauveteurs pourraient tirer le meilleur parti des expériences précédentes pour améliorer les résultats.
Une seconde est l'installation, sur tous les navires à cargaison
dangereuse, de systèmes de remorquage d'urgence, ou au moins d'oeils, adaptés pour les remorquer
lorsqu'ils sont à demi submergés, retournés ou cassés en deux.
Une troisième est une formation des capitaines sur leur responsabilité
à l'égard de l'environnement, de sorte qu'ils se sentent réellement concernés et fassent de leur
mieux pour assister ceux qui sont chargés de lutter contre la pollution lorsque leur navire peut
être une source de pollution.
Une quatrième, directement en relation avec la précédente, serait
des outils et des règles pour que les capitaines puissent transmettre rapidement des informations sur
leur navire et leur cargaison aussitôt après l'envoi d'un "Mayday". Ce pourrait être sous forme de
message électronique pré-formaté, concernant la structure du navire, ses équipements, sa cargaison,
et qu'ils puissent emporter avec eux en cas d'évacuation, du genre disquette ou CD-Rom ou équivalent
qui pourrait être copié à partir de l'ordinateur cargaison. On pourrait envisager encore plus d'éléments.
Un exemple: au Japon, un projet national pour la recherche de nouveaux moyens pour protéger l'environnement
des pollutions provenant de pétroliers vient d'être lancé. Dans ce projet on étudie le remplacement
de robustes étraves à bulbe par des avants amortisseurs.
Retour d'expérience sur le remorquage d'urgence
Lorsqu'un navire est en avarie en mer, les politiciens, les
journalistes et le grand public considèrent que la seule question vraiment importante est qu'il soit
accepté par un port de refuge convenable, et que son remorquage soit rapidement organisé, si
remorquage il y a besoin.
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L'opération de remorquage par elle même étant considérée comme purement
technique : les professionnels connaissent leur travail et le feront. Les professionnels connaissent bien leur travail et sont
passionnés. Ils connaissent parfaitement les capacités et les limites de leur navire, de leur
équipage et de leur matériel. Mais ils ne peuvent qu'imaginer celles du navire endommagé, de son
équipage et de ses réactions en fonction des conditions météorologiques. Ils apprécieraient
grandement de pouvoir avoir accès immédiatement au dossier d'un accident semblable, impliquant un navire similaire,
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dans des circonstances assez proches. Mais bien que la plupart des remorqueurs de haute mer soient
affrétés par les Autorités, ils sont généralement la propriété d'armateurs privés et de ce fait les
professionnels ont rarement accès aux informations détenues par d'autres compagnies de sauvetage.
Pour l'instant, la plus grande partie des retours d'expérience
repose sur l'expérience que possède l'équipage du remorqueur. Si les hommes changent, l'expérience
est perdue. Les archives des sauvetage décrivent les routes de remorquage, les conditions météo, la
tension de la remorque, les conditions du navire remorqué. Si une base de données pour ces informations
était disponible, les sauveteurs auraient accès à des données réelles.
Ceci est de la plus grande importance, car le remorquage est la
prévention de second niveau, ce qui veut dire la capacité à limiter les conséquences d'un incident ou
d'un accident lorsqu'il se produit . Il faut réagir :
- Dans le minimum de temps
- Avec la meilleure connaissance possible
- Avec la plus grande efficacité
Le but est d'agir, d'agir vite et bien.
Pour atteindre ce but, il faut non seulement être entraînés à la réponse d'urgence, mais aussi il
y besoin d'avoir accès aux dossiers des actions précédentes afin d'aider à prendre une décision.
La généralisation des remorqueurs d'assistance sous le contrôle
des autorités, basés en permanence dans des zones dangereuses à trafic important, doit améliorer la
possibilité de rassembler des retours d'expérience. Un groupe international d'étude sur la technique
de remorquage, dont le but serait de faciliter un accès mutuel aux dossiers de remorquage et de
retour d'expérience permettrait d'élaborer des propositions qui pourraient être présentées conjointement
à l'OMI.
Un tel projet ne serait pas onéreux. Il pourrait démarrer sur une
base de volontariat, chapeauté par une organisation bilatérale ou régionale déjà existante, éventuellement
comme une extension des échanges de coopération déjà en place au sein du NMRI-CEDRE (Girin 2001). Il
pourrait prendre la forme de réunions de petits groupes de spécialistes cooptés.
Chaque réunion serait centrée sur l'exposé et la discussion d'une
ou plusieurs opérations de remorquage importantes, avec l'accord et le soutien de l'autorité
responsable, dans chaque pays, par les remorqueurs de haute mer sous son contrôle. Un secrétaire de
groupe créerait et tiendrait à jour une base de données permanente, et accessible, regroupant les
informations rassemblées et échangées lors des réunions. Les membres du groupe seraient invités à
coopter d'autres membres. Par la suite le groupe pourrait être formalisé sous l'autorité de l'OMI.
Apparaux de remorquage prépositionnés pour navires retournés ou cassés
Les systèmes de remorquage installés, particulièrement les systèmes
de remorquage par l'arrière sur les pétroliers, sont une amélioration considérable pour le passage de
remorques en urgence. L'exemple du pétrolier Erika a montré l'efficacité d'un tel système. Mais pour
le moment, ce n'est obligatoire que sur les pétroliers de plus de 20000 tonnes de port en lourd.
Indépendamment de la taille, tous les navires transportant des
matières dangereuses ou polluantes devraient être équipés d'un tel système, notamment les porte-conteneurs,
tout en insistant sur le fait que la meilleure précaution est d'agir sur le confinement, c'est à dire
sur le navire (voir l'accident du MSC CARLA au large des Açores en 1997).
De tels systèmes sont inutiles avec des navires cassés. Mais
malheureusement certains types de navires ont une tendance toute particulière à se casser par le
milieu par mer forte. Les minéraliers et les pétroliers en sont un exemple typique.
Les archives d'accidents montrent que la partie arrière d'un
navire cassé en deux flotte tout d'abord normalement, puis plus ou moins rapidement coule à partir
de l'avant, la poupe émergeant totalement pour quelques instants. Un système de remorquage par
l'arrière, lorsqu'il existe, présente un intérêt certain. La partie avant souvent se couche et se
retourne peu après avoir cassé, et tout système de remorquage sur le pont devient aussitôt inutilisable.
Il arrive parfois que le navire se brise ou se casse en deux en
raison de son âge, d'une collision sur une mer forte ou souvent dérive à la suite d'une avarie
machine. La coque entière du navire ou la partie qui dérive vers la côte peut provoquer une pollution
très importante, ou bien une collision, une explosion et un incendie. Le remorquage devient nécessaire
pour éviter qu'une seconde catastrophe se produise à la suite de la première. Le passage d'une
remorque est particulièrement difficile lorsqu'il s'agit d'épaves séparées. Dans le cas du Nakhodka
(SOF 1997) les sauveteurs ne pouvant s'en approcher en raison de la mer forte. Deux navires de
patrouille des Coast Guards Japonais tentèrent d'aider à l'empêcher de dériver en utilisant
son fil d'acier de remorquage. Le frottement sur l'angle de la coque en raison des mouvements sur la
houle provoqua la rupture de ce fil d'acier de remorquage.
Le passage de la remorque sur l'épave est généralement réalisé par
les équipes de secours ou de sauvetage dans une opération quasi désespérée. Les probabilités de
réussite de passage de la remorque diminuent très vite par mer forte. Si des pattes de remorquage
sont pré-installées sur la coque, le travail des équipes de secours ou de sauvetage peut être
considérablement réduit et le taux de réussite pour éviter la seconde catastrophe considérablement
accru. Bien que ces mesures concrètes n'aient pas encore été proposées, les navires transportant des
cargaisons dangereuses devraient être équipés de moyens efficaces de sauvetage.
En ce qui concerne les spécifications pour les pattes de remorquage,
on doit prendre en compte :
- Le niveau de résistance de la patte de remorquage en fonction du type navire.
- Lorsque l'aide de plongeurs est nécessaire, au moins une position sous le tirant d'eau
devra être étudiée pour le passage de la remorque.
- Les positions devront être soigneusement choisies à la fois verticalement et horizontalement.
Dans un premier temps on considèrera la manoeuvrabilité du navire remorqué.
Dans un deuxième temps on prendra en compte la dérive de la partie remorquée au moment où on sera prêt à passer
la remorque.
- On réduira au mieux l'augmentation de résistance à l'avancement créée par ces appendices
supplémentaires.
Le NMRI a démarré un projet de recherche sur ces points à la suite
de l'accident du Nakhodka. Le sujet étant tout à fait en rapport avec ce qui vient d'être exposé, il
pourrait être intégré dans le programme du groupe de travail international sur le remorquage proposé
plus haut. Dans ce cas, le groupe examinerait les recherches sur les pattes de remorquage existantes
ou programmées dans les autres pays et pourrait inciter des instituts de recherche compétents pour
formuler et améliorer des projets de recherche sur ce sujet.
Formation de base des capitaines sur leur responsabilité à l'égard de l'environnement
Les capitaines et les armateurs se plaignent souvent que les
commandants sont mal traités par les autorités nationales lorsqu'ils sont impliqués dans une
pollution, parfois jetés en prison pour des mois, et poursuivis sans aucune considération des règles
de leur pays ou de leur pavillon.
C'est une plainte recevable. Mais d'un autre côté‚ les autorités concernées et les populations
côtières des régions touchées sont souvent surprises par les faibles connaissances et le peu
d'intérêt pour l'environnement de beaucoup de capitaines de navires pouvant polluer ou polluant.
Un exemple récent est celui du porte-conteneurs Melbridge Bilbao
(France 2001). En route de Vera Cruz (Mexique) et la Havane (Cuba) pour Rotterdam (Pays Bas), le
navire se dirigeait de nuit sur le dispositif de séparation de trafic de Ouessant, à la pointe de
Bretagne (France), avec un officier seul de quart à la passerelle. Il a raté la voie montante du TSS
de plus de 10 miles et s'est échoué à 17 noeuds, à 07h20, entre deux rochers, sur l'île de Molène.
Heureusement, il a pu se tirer de cette situation inconfortable à la pleine mer de l'après-midi et a
été remorqué dans l'anse voisine de Berthaume pour une inspection (il avait perdu du fuel). Le jour
suivant il entrait au port de Brest.
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La pointe de Bretagne
a été l'objet d'une pollution considérable de la part du trafic maritime durant les 30 dernières
années, et les populations côtières sont très sensibilisées à toute menace de la part des navires
transitant le long des côtes. En outre l'explosion, dans le port de Brest, d'un navire transportant
du nitrate d'ammonium, juste après la dernière guerre, a fait beaucoup de victimes dans la
population et toute entrée de marchandises dangereuses dans le port est l'objet de discussions
animées. |
Tout au long de cette journée, le commandant avait confirmé aux Autorités maritimes Françaises
qu'aucun des 218 conteneurs à bord ne contenait de marchandise dangereuse, que ce soit
potentiellement explosive ou polluant marin potentiel. Ce ne fut que vers la mi-journée du 13,
alors que les dispositions finales pour le remorquage vers le port étaient en cours, que le
manifeste complet fut communiqué aux Autorités faisant apparaître la présence d'un conteneur de
polluant marin potentiel, plus précisément "produits catalytiques", avec information de contact en
espagnol renvoyant à une compagnie à Mexico.
Les spécialistes pollution durent attendre l'ouverture des bureaux
à Mexico pour contacter le personne compétente et apprendre que les produits étaient d'origine
européenne, renvoyés au fournisseur, ne contenant rien de plus dangereux pour l'environnement que du
diesel. Les Autorités concernées, le port et le capitaine ne furent informés de l'absence de danger
que moins d'une heure avant l'arrivée du navire à l'entrée du port, évitant ainsi un refus d'accès.
L'incident s'est terminé sans dommage physique, mais sans
enthousiasme de la part des Autorités françaises ni des populations. Comment était-il possible que le
capitaine n'ait pas pris soin d'informer les Autorités dès le début qu'il avait à bord un conteneur
de dangereux? Comment se fait-il qu'il ne se soit pas senti concerné par la recherche d'informations
sur le danger de cette cargaison? Il n'y avait qu'une seule réponse : il ne se sentait pas concerné
par les dangers que présentait son navire pour l'environnement.
Lorsque 60 conteneurs tombèrent à la mer le ler février 2002, dont
un de 3 citernes de produit chimique hautement réactif dans l'air et l'eau de mer, à 135 milles dans
le SW d'Ouessant, le commandant du Lykes Liberator, en route de Brême (Allemagne) vers Charleston (USA),
ne fit rien de plus que prévenir les Autorités françaises de cette perte. Ce ne fut que 6 jours plus
tard, après de nombreux coups de fil, que l'équipe Française de lutte contre les pollutions put
informer le public de la nature réelle de ces produits chimiques, des dangers présentés, et des
précautions à prendre au cas où les citernes seraient drossées à la côte. Était-il réellement
impossible pour le commandant d'apporter son aide durant ces 6 jours? Ou était-il trop occupé pour
se sentir concerné ? Était-il conscient qu'il n'était guère très apprécié ni des Autorités ni des
populations côtières.
En fonction de ces exemples et de nombreux d'autres, nous pensons
qu'il y a un besoin évident d'informer les capitaines sur la façon dont les pollutions par les
navires sont perçues par les populations côtières. Il faudrait leur apprendre à comprendre pourquoi
et comment ces populations se sentent condamnées par des lois internationales qui sont différentes,
comment elles ont l'impression d'être prises au piège par les dangers potentiels d'un trafic maritime
international qu'elles perçoivent comme loin d'être un passage innocent. Une simple session de 3 jours
sur le sujet dans toute la carrière d'un capitaine pourrait efficacement changer son attitude à
l'égard des polluants potentiels à bord de son navire. Il comprendrait sa responsabilité‚ vis à vis des
pays au large desquels il navigue.
Des formateurs dans les zones côtières proches de grandes routes
maritimes seraient heureux d'organiser de tels stages, à un coût modéré pour les compagnies. Et les
compagnies maritimes pourraient revendiquer, à bon droit, que des capitaines, formés et aidant
réellement les équipes de luttes à faire face à un accident majeur, ne soient pas mal traités ni jetés
en prison. En outre, le traitement de crises devrait être inclus dans les formations des capitaines,
non seulement pour la sécurité du navire et de son équipage, mais aussi afin de faciliter d'autres
interventions consécutives à des incidents dans le but d'éviter des dommages aux populations côtières
et à l'environnement.
Le CEDRE, conseiller de l'Autorité française de lutte contre les
pollutions marines et centre de formation international aux techniques de lutte serait certainement
très heureux d'organiser des sessions abrégées de formation pour les capitaines, en coopération avec
des armateurs le souhaitant. Si les parties intéressées trouvaient ce stage valable, il pourrait
ensuite être présenté conjointement à l'OMI pour une intégration possible dans les formations OMI.
Transmission rapide des informations navire et cargaison
Les sauveteurs français, qui se portèrent volontaires pour être
héliportés sur le chimiquier levoli Sun le 30 Octobre 2000 (M.Girin, C.Rousseau), après que le
commandant et l'équipage aient été mis en sécurité à terre, et les spécialistes français de lutte
contre la pollution, qui ont évalué les dangers présentés, auraient très certainement apprécié que le
commandant de ce navire montre qu'il se sentait concerné par la protection de l'environnement et
qu'il voulait coopérer. Ses officiers et lui-même sont arrivés à terre sans aucun document
concernant le navire et sa cargaison, ils n'avaient que les informations dont ils pouvaient se
souvenir. Ils étaient saufs, grâce aux Autorités françaises, leur navire allait sombrer très bientôt,
mais ils ne se sentaient pas concernés par les conséquences possibles du naufrage.
Il aurait pu être techniquement possible pour le commandant
d'envoyer aussitôt après son "Mayday" un fax ou un message électronique donnant des informations sur
la structure du navire, les moyens de remorquage et la cargaison, au profit non seulement de ceux qui
essaieront de le sauver lui et son équipage, mais aussi qui auront à faire face ensuite contre la
pollution engendrée par son navire. Un commandant conscient de l'environnement, ayant suivi le stage
de formation propos‚ ci-dessus, aurait peut être été professionnellement fier d'emporter avec lui,
au moment du sauvetage, un jeu complet des informations indispensables sur la structure du navire, de
ses équipements et de la cargaison, sous la forme d'un CD-Rom ou équivalent, chargé rapidement depuis
les ordinateurs du navire.
Cela n'est pas à l'ordre du jour pour les capitaines, ni pour les
législateurs d'en faire une règle au moment de l'évacuation. Dans cet accident particulier, la
conséquence a été que les sauveteurs français ont dû rechercher des informations sur place, sur un
navire prêt à sombrer, dans un environnement à risques en raison du mauvais temps, des produits
dangereux et du risque potentiel d'explosion.
Un des principaux problèmes était de bien comprendre la situation
avant d'intervenir, afin de préparer la logistique de l'opération. Sans documents fiables il a fallu
travailler sur des plans approximatifs.
Le manque d'information peut conduire à des évaluations diverses
de la situation et compromettre toute l'opération, car lorsqu'ils sont sur place, les sauveteurs ne
peuvent faire confiance qu'à eux-mêmes.
Dans ce même accident, les membres de l'équipe de lutte contre la
pollution essayaient de déterminer la nature exacte de l'un des 3 produits chimiques à bord du navire,
lorsque le commandant et les officiers sont arrivés au poste central de lutte contre la pollution et
purent enfin les éclairer. Pendant ce temps là les médias n'arrêtaient pas de poser des questions sur
la nature exacte de la cargaison et ses dangers. L'équipe de lutte aurait sûrement apprécié de
disposer de beaucoup plus d'informations écrites, en particulier les données de sécurité pour le
transport maritime des produits, qui n'arrivèrent de l'affréteur que plusieurs heures plus tard.
Avec les moyens modernes de communication, il devrait être facile
d'élaborer une procédure de transfert en direct, automatiquement à partir du navire, des données
concernant le navire et sa cargaison à destination des Autorités chargées de la lutte. Nul besoin de
règles internationales pour cela. Les armateurs peuvent décider d'eux-mêmes d'équiper leurs navires
des moyens nécessaires et de donner les instructions pertinentes à leurs capitaines. Mais sont-ils
réellement prêts à en prendre l'initiative? Attendront-ils, une fois de plus, pour commencer à
bouger, que des règles internationales soient proposées par d'autres, que des pressions soient
exercées, puis que ces règles soient négociées puis mises en vigueur. On a dit à plusieurs reprises
qu'un armateur "ne doit pas payer plus que ses concurrents" et que son souci principal, lorsqu'il est
certain de ne pas payer plus, est la solidité de son navire. Pas question d'aider les autres même si
son navire devient une source de problèmes (Mikelis, 2001). Mais il est évident que les conséquences
potentielles d'une pollution, en termes d'image, de nouvelles règles, et finalement d'augmentation
des coûts, font que les armateurs s'ouvrent à de nouveaux concepts.
Conclusion :
Les idées et propositions présentées ne sont que des exemples
tirés de l'expérience de trois spécialistes de formations très différentes mais très complémentaires.
Il faut bien comprendre qu'elles ont été formulées uniquement parce que le monde maritime actuel a
été incapable de démontrer un intérêt pour la protection contre les dommages causés à ceux qui vivent
le long de côtes mises en danger par le passage, pas si innocent que cela, d'un trafic maritime
intense.
Les auteurs sont des techniciens spécialisés, pas des activistes.
Ils ne demandent pas de limitation du trafic, d'augmentation des sanctions, ou de traitement
différent. Ils comprennent les soucis des armateurs pour une saine compétition. Ils comprennent que
la sécurité, du point de vue de l'armateur ou du capitaine est tout d'abord la sécurité de l'équipage,
puis la sécurité des biens de l'armateur et de l'affréteur, et le reste ensuite. Mais ce "reste" ne
peut rester ignoré de l'armateur du fait qu'il existe un système international de compensation, dans
des limites financières fixées, pour les dommages économiques. Qu'ils le veuillent ou non, les
armateurs devront montrer dans l'avenir qu'ils sont prêts à prendre en compte l'existence des
populations côtières.
Les idées et propositions présentées pourraient contribuer à
démontrer un début de prise en compte par les armateurs des intérêts d'autrui. Elles ne veulent pas
révolutionner le monde du transport maritime. Aucune ne peut réaliser le rêve de "plus jamais ça" du
grand public. Mais chacune est une pierre, pas très onéreuse, qui pourrait contribuer efficacement à
un transport maritime plus sûr pour l'environnement.
Les auteurs sont conscients que d'autres, dans leurs pays et
ailleurs, ont de l'expérience, des idées et des propositions intéressantes, qui pourraient devenir
d'autres pierres constructives vers un transport maritime plus sûr pour l'environnement. Ils
contribueront avec joie, dans le cadre du projet à venir des agences régionales pour la sécurité
maritime, à la mise en place d'un ou plusieurs groupes de réflexion ou de travail, internationaux et
informels, pour étudier et discuter les idées présentées ici, ainsi que d'autres idées intéressantes,
et déterminer les meilleurs moyens pour mettre en oeuvre les plus valables et à des coûts
acceptables.
Les groupes de réflexion étudieraient les côtés techniques
favorables et défavorables de chaque idée. Ils prendraient en compte les vues légitimes de toutes les
parties concernées. Leur objectif serait de trouver les conditions techniques acceptées par tous pour
une mise en oeuvre efficace. Ces conditions techniques seraient ensuite librement accessibles, par
tout moyen adéquat, aux législateurs régionaux, nationaux et internationaux, pour éventuellement
légiférer à quelque niveaux que ce soit, si cela est opportun. Dans le même temps, si des projets
étaient acceptés par les Autorités concernées et par les éléments les plus innovants du monde
maritime, les groupes de réflexion proposés pourraient se transformer en groupes opérationnels,
pour commencer la mise en oeuvre des projets acceptés, à titre de pilote, avec les éléments
volontaires.
Traduction par le Cdt J.P. DALBY du texte présenté en anglais au colloque "SAFER SEAS à Brest par:
Cdt Charles CLADEN, Les Abeilles Internationales, FRANCE
Dr Shoichi HARA, National Maritime Institute, Japon
Dr Michel GIRIN, CEDRE, FRANCE
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