Après avoir narré quelques interventions, en respectant le secret bien évidemment, il rappelle que le psychologue doit aussi avoir un rôle auprès du capitaine du navire.
Bien entendu, il peut agir en tant que télé-conseiller vers les capitaines des navires n'ayant pas de personnel médical à bord.
En cas de mauvaise nouvelle à bord, l'équipage peut être support ou bien contrainte (cas d'un décès). En ce qui concerne le harcèlement, le milieu isolé qu'est le navire est un facteur de risque. Il y a une double dangerosité : le harcèlement en lui-même et l'isolement du groupe équipage entrainant l'effondrement de la résilience groupale ainsi que le sentiment de dangerosité permanent.
Conclusion
A chaque temps son évaluation, il faut des personnes impliquées ET des ressources groupales à bord et sociales à terre.
Nécessité d'appréhender les spécificités de la culture du métier, et souvent sa marginalisation sociale.
Vigilance quand le groupe support devient contrainte.
CUMP : Cellule d'Urgence Médico-Psychologique
Les CUMP ont une place reconnue dans le système de santé français, un ancrage clair malgré les évolutions récentes du paysage de la psycho-traumatologie, avec une bonne assise scientifique, et inscrites comme un volet à part dans les plans de secours type ORSAN (Organisation de la réponse du système de santé en situations sanitaires exceptionnelles).
Facteurs psycho-sociaux de vulnérabilité :
Nature du travail, conditions de vie, durée d'embarquement, éloignement, promiscuité, bruit, langue, travail posté, activité répétitive, faible pouvoir décisionnel.
Exposition à des évènements potentiellement traumatiques :
Intentionnalité humaine (piraterie, agressions), accidentelle, traumatismes vicariants (sauvetage en mer, migrants), poids de la responsabilité éthique, morale et pénale.
En milieu maritime, il y a déjà les CROSS, le CCMM, le SCMM (Samu de Coordination Médicale Maritime). Un CUMP en milieu maritime devrait utiliser le CRAPEM.
TSPT : Trouble de Stress Post-TraumatiqueEnjeux psychologiques des missions de sauvegarde de la vie humaine dans le Pas-de-Calais – EV1 ABECASSIS,
ESPT : Etat de Stress Post-Traumatique
La prévalence ESPT est de 1,9% dans la population générale, de 20% chez les marins et de 4,5% chez les secouristes bénévoles.
Hypothèse de départ :
Les sauveteurs embarqués de la SNSM associent risques maritimes et risques liés à leur activité de secouriste.
Facteurs de risques :
Le système d'alerte via une application mobile, une mobilisation rapide, l'imprévisibilité, le milieu hostile de l'action.
Facteurs protecteurs :
La vie d'équipage au sein de la station (échanges entre pairs et exercices réguliers), la place du patron (coordinateur et présence au retour des interventions).
La psychoéducation et la formation comme outils de prévention à la SNSM :
- Existant : formation initiale de secourisme, formation détresse psychique
- Travaillé : réalisation d'un module e-learning souffrance psychique et évènement traumatique
- En projet : formation à destination des patrons sur le repérage de la souffrance psychique et sur l'accompagnement des équipages suite à un évènement traumatique.
L'impact psycho-traumatique des missions aveugles :Gestion d'un décès à bord – Dr COUDREUSE
Ce sont des concepts encore débattus mais il y a consensus sur l'incidence, similaire à l'implication directe. Des tableaux cliniques d'intensité proche mais d'allure différente, due à des modalités d'exposition variées (facteurs de risque et de protection).
Prévention, préparation et communication sont des mesures mises en œuvre ayant des effets bénéfiques puisque moins de marins reçus en souffrance.
Cette mission est singulière, car elle concentre tous les facteurs de risque :
Mission récente, croissance très forte et continue, transformation permanente des modalités de réponse, encadrement politique, juridique et administratif en construction, résonance politique et médiatique très forte, injonctions parfois contradictoires, moyens limités, environnement concentrant déjà de nombreuses problématiques (géographie), des marins jeunes à qui l'on demande polyvalence, rusticité et esprit d'initiative, sentiment de tension entre acteurs sensés coopérer, pression de la société civile générant un manque de reconnaissance et de l'insécurité (responsabilité pénale), exposition visuelle et/ou sonore à des scènes potentiellement traumatogènes (enfants, refus de prise en charge, films WhatsApp), régénération difficile (rythme opérationnel, escales, double équipage).
Les facteurs protecteurs :
Sens de la mission, préparation opérationnelle, cohésion du groupe.
Impact des missions aveugles sur les équipages des bateaux :Impact des missions aveugles sur les CROSS et sémaphores :
- Intervention concrètes impliquant une mobilisation physique et mentale absolue
- Décisions fondées sur des informations directement perceptibles
- Contact avec les personnes secourues (gratification / détresse)
- Potentielle exposition à la mort.
Suite aux derniers retours d'expérience, les efforts sont à poursuivre :
- Exposition sonore (voire vidéo) à la détresse
- Sollicitations pressantes et parfois agressives
- Difficulté à se forger une idée claire de la situation
- Professionnels de la gestion de la panique, procédures à dérouler
- Peu ou pas de retour sur les actions coordonnées réussies.
Suite aux derniers retours d'expérience, ce qui fonctionne déjà :
- Maintenir le travail de communication (interne et externe)
- Formation et préparation, c'est la meilleure rentabilité d'investissement et améliore l'efficacité. C'est également une double protection contre les traumas potentiels, les missions sont mieux vécues
- Favoriser le partage et le retour d'expérience pour une traçabilité ultérieure
- La question de la sélection / volontariat
- La limitation du nombre de personnes exposées
- Avoir un compte-rendu le plus rapidement possible
- L'attention portée au collectif qui est le premier espace de projection des difficultés.
La mort en mer, c'est l'errance des âmes, des âmes sans repos, entre la vie et la « vraie mort ». Pour ceux qui restent à terre, c'est aussi la quête des corps naufragés sur la grève.
Entre 2000 et 2019, selon une étude sur 78 compagnies de croisière, cela représente 623 décès à bord, dont 89% de passagers.
Selon le BEA Mer, il y a eu 25 morts ou disparus en 2023, 11 accidents mortels au travail maritime (pour la France) à la pêche et 1 au commerce en 2021.
Plus le problème des migrants.
Un exemple récent :
Appel au CCMM d'un voilier en route transatlantique avec un marin présentant une douleur thoracique. D'abord gestion en premiers soins, mais suivant la dotation plaisance. Rappel 30 minutes plus tard pour un arrêt cardio-respiratoire, et mise en œuvre de réanimation de base pendant 45 minutes. Puis décision d'arrêt de la réanimation par le médecin du CCMM, le patient est considéré décédé.
Mais il reste trois jours de mer.
Cela nécessite une considération psychologique pour l'équipage survivant par le CRAPEM. Egalement la gestion et la conservation du corps, enveloppé dans une voile et placé dans l'annexe remorquée. Prévision de l'accueil de l'équipage aux Açores par des relais locaux et représentant du ministère des Affaires étrangères français.
Cela nécessite également la gestion des familles à terre en France, trouver et prévenir la famille.
La gestion d'un décès à bord est de dimensions multiples avec des réponses diverses.
Dimensions médicale, psychologique, médico-légale. Il faut tracer et compiler tous les éléments autour du décès, conserver le corps ainsi que les indices et preuves, s'il y a un médecin de bord, est-il médecin légiste ?, le capitaine est officier d'état civil et de police judiciaire, qui fait le constat et le certificat de décès ?
Les réponses varient suivant la taille du navire (capacité à conserver le corps : chambre froide, mortuaire, housses mortuaires) et son caractère professionnel (quelle dotation est à bord, quelles formations ont reçues les autres membres d'équipage), la position du navire (temps de traversée avant l'arrivée à terre, possibilité d'évacuer rapidement le corps), la présence ou non d'un médecin à bord (si oui, le certificat de décès est fait à bord, on est en gestion interne).
Dimension psychologique : la « famille équipage »
Selon la capacité ou non à isoler le corps, il peut y avoir promiscuité avec le défunt, d'où un impact important sur le vécu de la situation. Conservation du corps dans une chambre froide : problème alimentaire. Lorsque le navire arrive à terre, il faut un suivi avant l'arrivée afin de s'assurer de la capacité à extraire le corps afin de protéger l'équipage d'un retour éventuel à bord. Il y a aussi un impact sur les « secouristes » du bord et sur le responsable des soins, que ce soit maladie ou accident.
La gestion d'un décès à bord, c'est donc une réponse au cas par cas, avec un fort potentiel psychologique, à prendre en compte à tous les niveaux : de l'équipage bien sûr et à l'ensemble de la chaîne des intervenants, y compris les sauveteurs embarqués ou hélitreuillés, les personnels des CROSS et les équipes médicales à terre.
Il y a donc un important besoin de formation et de préparation, comme de débriefing voire de defusing. Le defusing est une technique de prise en charge dans les premières heures qui suivent des personnes qui viennent de vivre un traumatisme psychique. Le débriefing se fait plus tard, quand la pression est retombée.