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La SNSM, le sauvetage en mer et le bénévolat
Avec l'aimable autorisation de la SNSM, nous publions l'article de M. Jean-Claude Hazera paru dans le numéro 167
de la publication des Sauveteurs en mer : "SAUVETAGE",

La société change, le bénévolat aussi. Certaines associations s'inquiètent car elles ont des difficultés à trouver de nouveaux membres prêts à s'investir dans leurs activités. Qu'en est-il chez les Sauveteurs en Mer ?
Par Jean-Claude HAZERA

S'il n'y avait plus de bénévoles…

Sans bénévoles, les canots de sauvetage resteraient à quai en France. C'est aussi simple que cela. « Le bénévolat, c'est l'ADN de la SNSM et du sauvetage en mer, toute son histoire », souligne son président. Plus de 9 000 bénévoles, dont 5 100 sauveteurs embarqués, qui doivent assurer la disponibilité de leur navire de sauvetage, grand ou petit, 365 jours par an, 24 heures sur 24. Un bénévolat « quasi professionnel », qui comporte un niveau d'astreinte et d'imprévisibilité assez exceptionnel. En plus, le sauvetage a besoin des « équipages à terre », dont la majeure partie des 900 formateurs, notamment ceux qui préparent les jeunes nageurs sauveteurs des plages. Même les journalistes de SAUVETAGE sont, en large partie, des bénévoles. L'association valorise le travail effectué par les bénévoles à 51,5 M€ en 2022, soit 51 % des ressources de la SNSM, somme que l'on peut comparer à l'autre ressource vitale : les 35,7 M€ de dons et legs reçus d'un très grand nombre de particuliers et de certaines entreprises.

Or, une population de bénévoles a besoin d'un renouvellement permanent. Jacques Pithois, trésorier national bénévole, estime par exemple que, dans les quelque 300 structures locales, 40 trésoriers doivent être remplacés chaque année. Aussi, dès que le moindre doute s'exprime sur la pérennité du modèle bénévole, des oreilles se dressent. Pour Emmanuel de Oliveira, président de la SNSM et « premier des bénévoles », c'est un sujet d'attention permanent.

Il arrive que le sujet vienne sur la table, par exemple à une récente réunion des délégués départementaux de l'organisation – bénévoles eux-mêmes –, dont l'importante fonction est d'assurer la liaison entre le siège parisien et toutes les structures de leur département. Chez les sauveteurs, on reste cependant à un niveau d'alerte modéré. Jacques Pithois note « une modeste dégradation des vocations » et « la fragilisation de certains bénévolats ciblés, notamment celui des formateurs ».

De manière générale, la dégradation modérée des vocations et de la disponibilité est prise en compte implicitement dans certaines décisions : avec l'aide des technologies modernes, l'équipage minimum pour appareiller avec les plus gros navires de sauvetage a été ramené à cinq personnes.

PAROLE DE BÉNÉVOLE
Le modèle bénévole est extrêmement noble. Abandonner toute idée de rémunération crée un rapport unique avec les autres.
Éric Chevallier, président de la station du Tréport.
Sauvetage n° 163


Mais le prestige des Sauveteurs en Mer et le renouvellement des bateaux et équipements assurent un courant d'intérêt régulier. Notamment dans les départements à forte tradition maritime. Encore plus si l'on va au contact des bonnes volontés potentielles.
« Nous essayons d'être présents à tous les forums des associations », explique Didier Lebeau, président de la station de Saint-Quay-Portrieux (Côtes-d'Armor). Il y a quelques années, son prédécesseur avait été obligé d'organiser, avec le soutien de la mairie, une campagne d'affichage pour réamorcer la pompe du recrutement. Elle soulignait que tout le monde peut devenir sauveteur, pas seulement les marins professionnels.


En 2023, la Croix-Rouge française a lancé une campagne de recrutement
pour trouver de nouveaux secouristes bénévoles.

ET AILLEURS, COMMENT ÇA SE PASSE ?

Les inquiétudes que l'on entend parfois chez les Sauveteurs en Mer ressemblent assez à celles qui s'expriment ailleurs : beaucoup de bénévoles n'ont pas envie de s'engager sur la durée et les associations ont du mal à en convaincre suffisamment de prendre des responsabilités. La société change, les bénévoles changent, les méthodes doivent-elles changer ? La Croix-Rouge essaye d'attirer des candidats par des spots au cinéma. D'autres associations recrutent en ligne.

« Nous n'avons pas de problème pour trouver les indispensables bonnes volontés pour des maraudes du soir ou pour servir les repas au camion, explique Pascale Carle, chargée de mission aux Restos du Cœur en Île-de-France. En revanche, quand il faut prendre des responsabilités dans la durée, les candidats se bousculent moins. Et, en Île-de-France, plusieurs associations départementales sont en administration déléguée par l'association nationale parce que personne ne veut être présidente ou président. »
Marie-Sophie Desaulle, présidente de la Fédération des Etablissements Hospitaliers et d'Aide à la Personne, évoque aussi des difficultés à intégrer des responsables. « Nos associations adhérentes peuvent heureusement compter sur des bénévoles à la base pour des coups de main essentiels dans les hôpitaux, les Ehpad ou les structures d'accueil des personnes en situation de handicap, indique-t-elle. En revanche, beaucoup d'associations membres ont du mal à trouver des candidats pour renouveler leur conseil d'administration. » Exemple de la difficulté à recruter des responsables à la SNSM : Frédéric Damlaimcourt a récemment mis fin à son mandat de délégué départemental du Finistère, département où la SNSM compte le plus de stations. Il a pris cette décision au bout de quatre ans et demi seulement – alors qu'il s'était engagé pour six ans – afin de s'assurer d'avoir un successeur. Beaucoup de candidats potentiels s'inquiétaient du poids de la fonction. Cependant, Philippe Dutrieux était prêt à prendre le relais. Disponible début 2024, il n'aurait peut-être pas eu la patience d'attendre. « J'ai donc décidé d'anticiper, explique Frédéric Damlaimcourt. Je lui laisse un département dans lequel nous avons développé la collégialité pour alléger, autant que faire se peut, la tâche. Je resterai moi-même disposé à donner des coups de main. »
 
En Île-de-France, les Restos du Cœur ont du mal à renouveler leurs cadres bénévoles.
PAROLE DE BÉNÉVOLE
Que l'on vienne du nord, du sud ou d'ailleurs, nous faisons tous partie de la grande famille de la SNSM. Hervé Prévot, bénévole à la station de Marseille, rencontré sur le stand de la SNSM au Nautic 2022.
Sauvetage n° 163

« PARLONS DE PARTAGER DES RESPONSABILITÉS »

Binômes, collégialité sont les mots d'ordre un peu partout… « Parlons de partager des responsabilités plutôt que de prendre des responsabilités », suggère Hubert Pénicaud, référent national vie associative à France Bénévolat. Quelques grandes associations ont poussé la réflexion un peu plus loin, explique-t-il. Puisque les jeunes ont l'air de vouloir assurer le relais du bénévolat (voir graphique ci-dessous), comment les amener à embrasser aussi des responsabilités ? Réponse : « Il faut repérer tôt ceux qui pourraient devenir des responsables et leur proposer des formations. Celles-ci sont inter-associatives, ce qui permet aux participants d'échanger, de comparer et de prendre du recul sur leur propre association. Les résultats commencent à se voir aux conseils d'administration de la Croix-Rouge ou de France Handicap, par exemple. » Les Sauveteurs en Mer aussi réfléchissent, depuis un certain temps, à une formation des responsables.

L'ALCHIMIE DU BÉNÉVOLAT

Trouver et fidéliser des bénévoles, c'est toute une alchimie. « Il faut être très clair au départ, sur les motivations et les contraintes, ne pas hésiter à prévoir des sortes de période d'essai », recommande Antoine Leroy, délégué à la vie associative et à la condition des bénévoles auprès du président de la SNSM. « Qu'est-ce qui fait que, dans un même bassin de vie et d'emploi, une station a plus de mal à renouveler ses troupes que l'autre ? », s'interroge Jean-Marie Choisy, délégué départemental de la Manche. Chacune a son histoire, sa culture, son ambiance.

Une fois recrutés et formés, encore faut-il que les sauveteurs soient suffisamment disponibles pour que les moyens puissent sortir. Formations, entraînements… Le sauvetage en mer est très exigeant en temps et, parfois, la lassitude peut s'installer. Les retraités, précieux aux heures où les autres travaillent, ont aussi leurs obligations, surtout quand ils aident leurs parents, leurs enfants ou leurs petits-enfants… voire tout le monde à la fois ! Ne pas être capable de répondre à un appel des centres régionaux opérationnels de surveillance et de sauvetage (CROSS) est un échec pour une station. Le patron de station ou le président battent le rappel si nécessaire, mais le risque existe même si ces situations restent extrêmement rares.

Parfois, les employeurs peuvent aider. À La Hague, la principale usine de recyclage du combustible nucléaire usé de la société Orano se trouve près d'une mer dangereuse et donc de plusieurs stations de sauvetage. Plus d'une dizaine de ses salariés sont sauveteurs. L'entreprise a signé, en octobre dernier, une convention qui leur donne cinq jours rémunérés par an pour pouvoir s'absenter en cas d'alerte. Elle prévoit aussi qu'ils puissent se reposer après l'intervention et que certaines de ces journées puissent être consacrées à la formation. Ailleurs dans la Manche, des accords de ce type existent aussi avec Naval Group, à Cherbourg, et EDF.

QUELLE « RECONNAISSANCE » POUR LES BÉNÉVOLES ?

Pour attirer et retenir les bénévoles, faut-il plus de « reconnaissance » ? Derrière cette expression se cache parfois l'idée qu'un peu de compensation financière pourrait aider. À la SNSM, les stations ont, par exemple, des politiques assez différentes les unes des autres en matière de défraiement. Certaines prennent par exemple en charge des frais de déplacement, mais cela reste symbolique.



 
Le Gouvernement a mis en place la plateforme jeveuxaider.gouv.fr afin de rapprocher les associations de ceux qui voudraient faire du bénévolat.

Dans la même veine, les instances politiques évoquent régulièrement des projets de « statut du bénévole », qui pourrait garantir, entre autres, des avantages en matière de retraite. Ils s'enlisent en général. Antoine Leroy, le délégué de la SNSM à la vie associative, n'y croit pas, car trop complexe à mettre en place. La vraie « reconnaissance » n'est-elle pas ailleurs, notamment dans le CV pour les actifs ? Pour ceux qui travaillent ou voudraient travailler dans le secteur maritime, les riches et exigeantes formations des Sauveteurs en Mer sont désormais reconnues comme formations professionnelles. Plus largement, quel directeur des ressources humaines ou patron ne regardera pas d'un œil positif la ligne d'un CV mentionnant un engagement à la SNSM ?

Il y a aussi tout le reste, plus intime, simplement humain. Le besoin de se rendre utile est aussi une affaire entre soi et soi-même. Ne sous-estimons surtout pas le lien humain, le plaisir d'être ensemble, la « famille orange » comme disent les Sauveteurs en Mer en référence à la couleur de leurs tenues. Embarqués pour une traversée un peu longue avec l'équipage de la station de L'Herbaudière, nous avions été frappés par le plaisir que ces sauveteurs avaient à se retrouver, sans la tension d'une intervention, et à couvrir le bruit des moteurs par leurs discussions pendant neuf heures.

Dans le cadre d'un baromètre mis en place pour la plateforme en ligne HelloAsso, l'entreprise de sondages OpinionWay a demandé à des adhérents des associations s'ils y recherchaient la convivialité plus que l'engagement. Réponse : 53 % de oui. « Où est le problème si un groupe de bénévoles bavardant allègrement réalise en trois heures plutôt qu'en une un travail sans urgence ? », demande Hubert Pénicaud chez France Bénévolat. C'est une des différences avec le « boulot ». Une autre serait d'avoir moins d'obligations administratives, ce qui n'est pas gagné.

Créer l'ambiance est un des talents indispensables aux présidents de stations et directeurs de centres de formation et d'intervention de la SNSM. Il faut obtenir que la mission soit bien remplie, tout en laissant vivre le groupe humain pour que l'engagement associatif soit aussi un plaisir. Les Sauveteurs en Mer sont aussi des bandes de copains et copines. En quoi serait-ce gênant ?

Internet, une arme pour les associations de bénévoles

Les jeunes générations s'intéressent à la vie associative. Les moyens modernes de communication peuvent-ils aider ceux qui aimeraient donner de leur temps à trouver l'association qui leur correspond ? Oui, bien sûr.

Le Web est un outil puissant pour des associations comme les Restos du Cœur ou les banques alimentaires, quand elles ont besoin de mobiliser des dizaines de milliers de bénévoles ponctuellement pour les grandes collectes annuelles.

Si vous cherchez à rencontrer des associations moins célèbres, mais peut-être plus près de chez vous, Internet peut être très efficace. Le Gouvernement a mis en place le site jeveuxaider. gouv.fr, où vous pourrez effectuer des recherches à partir d'un code postal. Les associations peuvent aussi y trouver leur bonheur : le site compte plus de 500 000 inscrits, dont 50 % ont moins de 30 ans, assure Nassim Merzouk, responsable du déploiement du bénévolat. On peut également poster des propositions d'actions à distance, sur le même mode de fonctionnement que le télétravail.

Le numérique peut aussi être, évidemment, une manière pour les associations de gérer leurs bénévoles. Celles qui n'ont pas, comme les Sauveteurs en Mer, de logiciel spécifique, et ont par exemple un événement à organiser (festival, manifestation sportive…), peuvent s'appuyer sur des solutions comme celle que propose qoezion.com. Cette start-up, incubée par la fondation MAIF, vend un logiciel qui permet aux bénévoles de s'inscrire et à l'association de communiquer avec eux, mais également de gérer les cartes d'accès, les plannings, les parkings, les repas…

Le bénévolat dans la société française

Un Français sur cinq pratique le bénévolat, selon Associathèque – site Internet à destination des associations, créé par le Crédit Mutuel. 36 % des plus de 15 ans, d'après France Bénévolat. Vingt et un millions de personnes pour l'INSEE… Les chiffres varient. Retenons qu'un grand nombre de Français participent à des activités associatives bénévoles. Mais aussi que beaucoup d'instruments de mesure amalgament des activités très différentes.

Les universitaires Viviane Tchernonog et Lionel Prouteau – dans leur dernière étude Le paysage associatif français, publiée en août 2023 – estiment que les secteurs sportif, culturel et de loisirs représentent ensemble plus de 60 % de l'implication bénévole. Or, comme le dit le président de la SNSM dans l'interview qui figure dans ce dossier, la participation à un club de pétanque n'est pas tout à fait de même nature que le temps consacré aux Sauveteurs en Mer ou aux Restos du Cœur.

Tous les indicateurs ne quantifiant pas la même chose, ce sont les baromètres publiés régulièrement qui donnent les informations les plus précieuses. Ils observent tous un trou d'air dans l'engagement bénévole dû à la Covid-19 et aux confinements, puis une reprise. Restent des états d'âme plus forts dans certains secteurs que dans d'autres.
 
Selon les universitaires Viviane Tchernonog et Lionel Prouteau, les secteurs sportif, culturel et de loisirs représentent ensemble plus de 60 % de l'implication bénévole.
Le baromètre été 2023 de la COFAC (Coordination des Fédérations et Associations de Culture et de Communication), par exemple, semble révéler une lassitude particulière dans le secteur culturel, touchant notamment les responsables. Ceci explique sans doute en partie les cris d'alarme lus régulièrement dans la presse régionale, beaucoup de festivals ne pouvant pas tourner sans des bénévoles.

Parmi les tendances générales, comme celles que l'on relève dans un des baromètres embrassant la plus large palette d'activités (baromètre OpinionWay pour HelloAsso paru en 2023), progresse l'envie de « découvrir de nouveaux engagements et de nouvelles activités ». Mais avec quel risque de « zapping » ? 64 % des sondés reconnaissent que « s'investir dans des activités en groupe demande une régularité en matière de présence, dont ils ne se sentent pas capables ». C'est le premier frein à l'engagement et cette tendance semble s'installer sur le long terme. « Avoir la possibilité de prendre des responsabilités » est une incitation qui n'arrive qu'en huitième position. D'où, peut-être, les difficultés à trouver des responsables s'engageant dans la durée.

Notre plus grande surprise dans toutes ces enquêtes, nous la devons à un graphique du baromètre Recherches & Solidarités (voir p.25), qui dénote un déclin régulier de la participation des retraités – sans doute plus sollicités sur le plan familial – et, surtout depuis 2022, la croissance de l'envie d'engagement des jeunes.

ENTRETIEN

« Nous exigeons énormément de nos bénévoles»


Emmanuel de Oliveira, président de la SNSM

Les alertes sur le manque de bénévoles en France sont régulières. Y a-t-il des signaux inquiétants à la SNSM ?
Je veux d'abord souligner que le bénévolat, c'est l'histoire de notre association. Il découle directement de la solidarité des gens de mer. En arrivant chez les Sauveteurs en Mer, j'ai très vite compris que c'était notre ADN. S'il n'y avait plus de bénévolat, ce ne serait plus la SNSM. C'est ce qui fait notre force par rapport à d'autres associations qui n'ont pas cet ancrage historique.
Pour autant, il faut veiller à tout signal de perturbation. On parle de crise du bénévolat en France. À la SNSM, les signaux sont plus diffus. Parfois, une station dit qu'elle a du mal à recruter, ou bien à avoir des sauveteurs disponibles aux heures ouvrables ou qu'elle rencontre des difficultés à remplacer des responsables, patron de station ou président. Pour autant, aucune station, aucun centre de formation et d'intervention n'a dû, dans les dernières années, fermer ou interrompre ses missions faute de bénévoles. La mission est remplie. On tient le coup.
Même s'il peut y avoir des problèmes de disponibilité de bénévoles ?
Oui. Je sais très bien comment ils se débrouillent. Ce sont les autres, ceux qui se rendent disponibles, qui prennent une charge plus importante. Dans la société d'aujourd'hui, beaucoup de bénévoles manifestent une tendance au « zapping » : je m'engage un peu et je change souvent. Notre problème, qui est aussi la force des Sauveteurs en Mer, c'est que nous exigeons énormément de nos bénévoles ; ce sont des quasi-professionnels, ce qui suppose une très forte motivation. C'est très différent de l'adhésion à un club de pétanque, quel que soit mon respect pour la pétanque et ceux qui la pratiquent.
Les sondages montrent que l'associatif bénévole peut moins compter sur les retraités. Comment motiver des jeunes ?
Une des forces de la SNSM est de rassembler toutes les classes sociales et tous les âges, femmes ou hommes, qui ont plaisir à s'y retrouver. Et qui ne sont pas seulement des sauveteurs opérationnels ! N'oublions jamais l'importance des équipages à terre, tous ces bénévoles qui apportent un soutien essentiel à la vie de la station et à son rayonnement sans embarquer en opération.
Chez les Sauveteurs en Mer, on rencontre aujourd'hui moins de retraités parce qu'il y a moins de marins retraités. Il faut compenser par la formation. L'effort sur la jeunesse, c'est l'investissement dans leur parcours de formation.
C'est un facteur d'attractivité ?
On me le dit. Beaucoup de jeunes viennent chez nous intéressés par les formations et les compétences. C'est une des raisons pour lesquelles nous entretenons, par exemple, une qualification plongeur, très motivante, même si les interventions sous l'eau ne sont pas notre cœur de mission.
On entend aussi dire que la formation est chronophage, qu'il y a trop de prérequis ; le brevet de secouriste, par exemple. Restera-t-elle fortement conseillée, mais pas obligatoire, notamment pour les stations qui forment par transmission des anciens aux nouveaux ?
Notre système de formation est assez récent. Donnons-nous le temps de l'observer et posons-nous cette question dans deux ans. Pour ce qui est des prérequis, je rencontre souvent des bénévoles pressés d'acquérir les plus hautes qualifications. Cela me fait plaisir. Mais je pense que c'est bien d'avoir un parcours avec des étapes avant d'atteindre le but ultime, qui est de commander en opération. Pour ce qui est du temps passé, la SNSM a réussi à faire inscrire ses formations au RNCP (Répertoire national des certifications professionnelles, ndlr). Résultat concret, les actifs peuvent prendre du temps de formation comme sauveteur sur leur temps de formation professionnelle et plus seulement sur leurs congés.
Les Sauveteurs en Mer les plus âgés sont pris entre un âge de départ à la retraite qui s'accroît et la limite d'âge qui ne leur permet plus de sortir en opération. Que faire ?
Ce sujet ne sera jamais clos. Nous avons déjà assoupli et reculé la limite d'âge dans les instructions générales de la SNSM. Il faudra sans doute y revenir dans les prochaines années. En tenant toujours compte de l'expertise de notre commission médicale, car ce sont les risques qui justifient ces limites.

Le prix de l'immobilier en bord de mer exclut certains candidats sauveteurs, qui ne peuvent respecter les délais d'appareillage des navires de sauvetage, moins de vingt minutes en moyenne. Que faire ?
C'est un vrai sujet. Nous nous créons une obligation. Nous n'avons pas de contrat pour respecter ce délai. J'encourage les stations à ne pas se priver de bénévoles habitant plus loin que les autres. Ils ne pourront pas répondre aux alertes les plus urgentes, quand des vies humaines sont en danger. Mais ils seront précieux pour remplir d'autres missions et décharger l'équipage d'urgence. Soyons flexibles.
Comme d'autres associations, la SNSM a du mal à trouver des personnes qui acceptent de prendre des responsabilités. Ailleurs, on voit se développer les binômes. Qu'en pensez-vous ?
Il faut travailler en équipe, en collégialité. Nous encourageons partout la création de bureaux et de binômes, type président et vice-président, pour que la charge puisse être répartie. La SNSM, avec ses cent vingt salariés, en a comparativement vingt fois moins que d'autres grandes associations. Nous reportons sur nos responsables bénévoles une charge de travail incombant ailleurs à des salariés.
Vous êtes le premier des bénévoles. À plein temps. Alors que votre carrière aurait certainement pu vous ouvrir des activités rémunératrices. Pas de regrets ?
N'ayant plus d'enfants à charge, j'ai le privilège de ne pas avoir de soucis d'argent. Le bénévolat est, pour moi, un épanouissement formidable. J'aime le contact humain, j'aime cet équipage. Mais cela tiendra, comme pour tous les bénévoles, tant que ma famille, ma femme tiendront. Il faut que les familles suivent. Nous ne mettons jamais assez l'accent sur ce soutien des proches de bénévoles, qui est indispensable à la bonne marche des Sauveteurs en Mer.


Les formations dispensées par les Sauveteurs en Mer et les compétences qu'elles permettent d'acquérir
attirent les jeunes actifs.
 

Réflexions en cours sur les nageurs sauveteurs

Les nageurs sauveteurs, chargés de la surveillance de plages ou de mettre en place des dispositifs prévisionnels de secours lors de rassemblements, font l'objet d'une réflexion en cours à la SNSM.

Ces jeunes, souvent étudiants, investissent beaucoup de temps et même un peu d'argent dans une formation de base très exigeante. Elle est dispensée tout au long de l'année scolaire par trente-deux centres de formation et d'intervention (CFI) sur tout le territoire français.

Une fois diplômés, ils sont mis à disposition des villes touristiques avec lesquelles la SNSM a passé une convention pour surveiller la baignade durant l'été. Ils sont logés et rémunérés, niveau Smic.
« Ils sont bénévoles dix mois sur douze », résume Emmanuel de Oliveira, président de la SNSM. Ils sont dédommagés pour l'astreinte, la présence. Le don de soi et le risque pris pour aller sauver des baigneurs ne le sont pas.

Les CFI recrutent sans problème environ cinq cents candidats à chaque rentrée scolaire. Mais, une fois la formation terminée, la SNSM manque désormais de sauveteurs en été pour satisfaire toutes les demandes des communes. Encore plus, sans doute, l'été prochain, à cause des Jeux Olympiques, qui vont mobiliser beaucoup de services de secours à Paris. Là où de jeunes étudiants passaient deux mois d'été sur une plage, certains ne veulent s'engager que pour un mois, ou moins. Parmi les plus expérimentés, on ne trouve plus assez de candidats chefs de poste ou adjoints. Certains ne viennent pas ou plus sur les plages, peut-être attirés par des surveillances plus rémunératrices (piscines, clubs de vacances, etc.). Pas très motivant pour les trois mille trois cents bénévoles, dont huit cents cadres et formateurs qui leur ont consacré du temps. « Je suis très reconnaissant à nos formateurs et dirigeants de CFI parce qu'ils n'auraient qu'à pousser la porte d'à côté pour bénéficier d'un régime matériellement plus favorable, insiste le président de la SNSM. Mais il ne suffit pas de s'en féliciter. Il nous faut conduire une réflexion sur la motivation de ces formateurs bénévoles pour qu'ils s'épanouissent pleinement. Sans sortir du bénévolat. »
 
Une fois diplômés, les nageurs sauveteurs sont mis à disposition des mairies.

PAROLE DE BÉNÉVOLE
Il y a une très chouette ambiance dans l'équipe formée par tous les bénévoles. Je suis touchée et fascinée par leur énergie, l'esprit de famille.
Céline Cabon s'occupe de la boutique de la station de L'Aber Wrac'h.
Sauvetage n° 165
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