Introduction
L'OMI est une institution ou agence spécialisée de l'ONU, au même
titre que l'Organisation de l'Aviation Civile Internationale (OACI) ou, pour en citer d'autres qui
ont à connaître de questions maritimes, l'Organisation Hydrographique Internationale (OHI),
l'Organisation Internationale du Travail (OIT), l'Union Internationale des Télécommunications (UIT),
l'Organisation Météorologique Mondiale (OMM), etc.
Les prémices
A la suite du naufrage du TITANIC, en 1912, une conférence
internationale réunissant treize pays avait mis au point un projet de convention qui se serait
appelée Sécurité de la vie en mer - Safety of Life At Sea, SOLAS 14, sans la guerre.
Cette première convention SOLAS s'était principalement attachée à
résoudre deux problèmes :
celui des moyens de sauvetage, de manière à ce qu'il y ait une place par personne dans la drome
et celui de l'harmonisation des veilles des installations de radiocommunications.
A noter que cette conférence s'était tenue sous l'égide de la
"commission consultative et technique des communications du transit" de la Société des Nations (SDN).
L'Organisation Maritime Consultative Intergouvernementale (OMCI)
L'OMCI a été créée en 1948 lors d'une conférence de l'ONU, à
Genève, mais ce n'est qu'en 1958 qu'elle commença à fonctionner. Elle "hérita" d'un certain nombre de
conventions élaborées au cours d'autres conférences, dont OILPOL 54, SOLAS 60 (en fait, la troisième
SOLAS après celles de 1929 et de 1948, COLREG 60), conventions qu'elle ne pouvait "toucher"
(amendements), son rôle se limitant à donner son avis quand on le lui demandait, sous forme de
résolutions ou de recommandations n'ayant aucun caractère obligatoire.
L'Organisation Maritime Internationale (OMI)
Pour obtenir le statut qui est maintenant le sien, et les pouvoirs
qui en découlent, il a fallu amender la convention de 1948, ce qui fut fait en 1975 avec une entrée
en vigueur en 1982.
Les membres de l'OMI
On distingue:
- Les États membres, actuellement au nombre de 159, plus deux États associés (v. annexe 1),
qui, pour la plupart, ont un représentant permanent auprès de l'Organisation et qui envoient des
délégations dans le différents organes (voir ci-après).
Ces membres ont le droit de vote.
- Les Organisations non gouvernementales, à statut consultatif auxquelles l'OMI a souvent recours,
notamment pour l'élaboration de règles techniques : sociétés de classification, organismes normatifs...
Le rôle de l'OMI
L'Organisation a notamment pour rôle:
- d'instituer un système de collaboration entre les gouvernements dans le domaine de la
réglementation et des usages gouvernementaux ayant trait aux questions techniques de toutes sortes
qui intéressent la navigation commerciale internationale, d'encourager et de faciliter l'adoption
générale de normes aussi élevées que possible en ce qui concerne la sécurité maritime, l'efficacité
de la navigation, la prévention de la pollution des mers par les navires et la lutte contre cette
pollution et de traiter des questions administratives et juridiques liées à ces objectifs .
- d'encourager l'abandon des mesures discriminatoires et des restrictions non indispensables
appliquées par les gouvernements à la navigation commerciale internationale, en vue de mettre les
ressources des services maritimes à la disposition du commerce mondial sans discrimination.
- d'examiner les questions relatives aux pratiques restrictives déloyales d'entreprises de
navigation maritime.
- d'examiner toutes questions relatives à la navigation maritime et à ses effets sur le milieu
marin dont elle pourra être saisie par tout membre, organisme ou toute institution spécialisée
des Nations Unies et faire des recommandations à leur sujet.
- de permettre l'échange de renseignements entre gouvernements sur les questions étudiées par
l'Organisation.
- et surtout d'élaborer des projets de conventions, d'amendements, d'accords et autres
instruments appropriés, de les "recommander" aux gouvernements et aux organisations
intergouvernementales et convoquer les conférences qu'elle juge nécessaires.
Comme on le voit, l'OMI a un rôle essentiellement réglementaire et
normatif à travers ses conventions et autres instruments devenus obligatoires (adoption par plus des
deux tiers des États membres).
Mais elle ne peut:
- obliger les États à incorporer ces textes dans leur corpus législatif et réglementaire
(encore moins quand il s'agit de résolutions, voire de circulaires)
- s'assurer elle-même de l'application de ces textes.
Les différents organes de l'OMI
L'Assemblée
C'est l'organe directeur de l'organisation. Il rassemble les
représentants de tous les États membres, en principe tous les deux ans, mais peut les convoquer pour
une Assemblée extraordinaire.
L'Assemblée :
- approuve le programme de travail.
- vote le budget: près de 37 M Livres pour 2000-2001, les États membres cotisant au prorata de
leur flotte de commerce.
- élit les membres du conseil.
- émet des résolutions.
Le Conseil
Il est composé de 32 membres (40 après ratification d'un
amendement en cours) élus pour deux ans et répartis en trois collèges :
- 8, représentant les États les plus impliqués dans le transport maritime international.
- 8, dont la France, concernés par le commerce maritime international.
- 16, parmi les autres, ayant des intérêts dans le transport maritime ou la navigation et
dont l'élection assure la représentation de toutes les zones géographiques les plus importantes
dans le monde.
Les Comités
- Le Comité de la Sécurité Maritime (CSM)
Le CSM est le plus ancien et le plus important comité technique.
Il suit plus particulièrement les questions ayant trait :
- aux aides à la navigation,
- à la construction et aux équipements des navires,
- à la prévention des abordages,
- au transport des marchandises dangereuses,
- à l'information nautique,
- au sauvetage et à l'assistance,
- aux effectifs,
tant dans les conventions, dont principalement SOLAS, (v. ci-après) et leurs amendements que les
codes, les directives et les résolutions.
Il est "assisté" par neuf sous-comités
- sécurité de la navigation (NAV), qui suit plus particulièrement les questions relatives à
l'organisation du trafic,
- radiocommunications (SMDSM), recherche et sauvetage (COMSAR), formation, certification et
veille (STW),
- marchandises dangereuses, cargaisons solides et conteneurs (DSC), conception et équipement de
navires (DE),
- sécurité incendie (FP),
- stabilité et lignes de charge, et sécurité des navires de pêche (SLF),
- liquides et gaz en vrac (BLG),
- application des instruments par l'État du pavillon (FSI), créé pour "tenter de pallier"
l'impossibilité pour l'OMI de vérifier l'application de ses règles.
- Le Comité pour la Protection de l'environnement Marin (MEPC)
Ce Comité a acquis le même statut que celui du MSC en 1985. Il est
chargé de toutes les questions environnementales, assisté en tant que de besoin par les sous-comités
cités ci-dessus. Il "gère" plus particulièrement la convention MARPOL 73-78.
- Le Comité Juridique
Créé en 1967, à la suite du naufrage du TORREY CANYON, il est
naturellement saisi de tous les problèmes juridiques, notamment de cohérence entre les différents
instruments, et notamment la Convention des Nations Unies sur le Droit de la Mer (UNCLOS).
- Le Comité de la Coopération Technique
Créé en 1969 et "régularisé" en 1984, ce Comité a pour vocation
d'aider, par voie d'experts, tous les pays qui en font la demande, de manière à leur faire ratifier
les conventions, à en intégrer les règles dans leur système juridique, à se doter des moyens propres à en assurer l'application (centres de sauvetage, inspection des navires, enquêtes après accidents, etc.).
- Le Comité de la Facilitation
Créé en 1972 et en cours d' "officialisation" depuis un amendement
de la convention FAL de 1991, ce Comité a pour but de simplifier les formalités maritimes pour
(essayer de) réduire les distorsions et déséquilibres concurrentiels entre États membres.
Le Secrétariat
Le Secrétariat est l'organe permanent qui assure le fonctionnement
de l'OMI. Il se trouve au siège de l'Organisation, à Londres, sous l'autorité d'un Secrétaire Général
élu pour quatre ans, renouvelables, par le conseil ; trois cents fonctionnaires internationaux y sont
affectés.
Ils sont répartis entre les différentes divisions correspondant
aux Comités, la division des conférences et les différents services : traductions, publications,
administration interne...
S'agissant plus particulièrement des Comités (et sous-comités),
le secrétariat:
- prépare et exécute le programme des réunions des différents organes sur la base moyenne d'une
semaine par an pour chacun,
- reçoit puis rediffuse à tous les États membres, les documents élaborés par certains d'entre
eux,
- prépare et encadre (secrétariat proprement dit) toutes les réunions des différents organes,
ainsi que les différents groupes de travail (généralement trois) et de rédaction qu'ils sont
amenés à former,
- prépare et diffuse les rapports de ces réunions, rapports qui remontent ensuite, en tant que
de besoin, la chaîne organique.
Les principaux instruments de l'OMI
Les Conventions
Ce sont les documents les plus importants. Elles se composent
généralement:
- de la convention proprement dite, qui n'entre en vigueur qu'après ratification par les deux
tiers au moins des États membres, tout comme ses amendements (éventuels), "explicites",
- des règles qui lui sont annexées et qui, elles, adoptées de la même manière, peuvent être
amendées "tacitement" et entrer ainsi en vigueur deux ans après, sauf oppositions.
A noter que les règles sont de plus en plus nombreuses et
détaillées.
Parmi les principales conventions, on peut citer :
- SOLAS 74 / Protocoles 78 et 88, amendée, qui comprend et couvre maintenant:
- des dispositions générales,
- la construction : compartimentage, stabilité, machines et installations électriques,
prévention et extinction des incendies,
- engins et dispositifs de sauvetage,
- radiocommunications,
- sécurité de la navigation,
- transport de grains et de certaines autres marchandises,
- transport des marchandises dangereuses (code IMDG),
- sécurité des navires à propulsion nucléaire,
- sécurité de gestion des navires (code ISM),
- sécurité des navires rapides (code HSC),
- mesures spéciales propres à améliorer la sécurité des navires (inspections).
Cette convention a été pratiquement totalement refondue. Certains chapitres sont applicables à tout
ou partie des navires en fonction de leur jauge.
- LL 66 / Protocole 88, amendée.
C'est la convention sur les lignes de charges qui, notamment par
le calcul, permet de déterminer l'enfoncement maximum admissible d'un navire par détermination d'un
franc bord : hauteur minimum entre le livet du pont de franc bord et la ligne d'enfoncement maximum,
fonction de la zone et de la saison de navigation.
Elle est applicable aux navires de plus de 24 mètres.
- COLREG 72 amendée.
C'est la convention qui fixe les règles de route, de manœuvre
(priorités) et de signalisation pour prévenir les abordages.
Elle est applicable à tous les navires sans exception (donc
y compris les navires de pêche et de plaisance).
- STCW 95 amendée (Seafarer Training, certification and watchkeeping).
Convention qui vise essentiellement à fixer des niveaux de
formation minimum et les conditions de veille.
- STCW - F 95 - Pour les pêcheurs.
- SAR 79 amendée - (Search and Rescue).
Convention portant organisation du sauvetage, en liaison avec
l'OACI, notamment en ce qui concerne les procédures (manuel IAMSAR - International Aeronautical and
Maritime Search and Rescue)
- MARPOL 73/Protocole 78, amendée.
Convention visant la prévention de la pollution des mers par
- les hydrocarbures,
- les substances dangereuses en "lots",
- les rejets des navires,
- les détritus des navires,
- les rejets des gaz de combustion dus à la propulsion,
- SALVAGE 89.
Cette convention uniformise les règles relatives à l'assistance
en mer.
Les Codes et Directives
Il s'agit de textes souvent conjoncturels, volontaires, les codes
obligatoires, quant à eux, ayant été intégrés aux conventions (notamment à SOLAS).
Les Résolutions de l'Assemblée
Les Résolutions sont adoptées par l'Assemblée (tous les deux ans). Il y a actuellement 900 Résolutions dont certaines ont été remplacées par de nouvelles, mais beaucoup seulement complétées.
Elles émanent essentiellement du CSM et du MEPC.
Elles sont volontaires, mais si certaines ont une portée un peu
générale, dont celles fondamentales sur l'organisation du trafic (ROUTEING) et sur les enquêtes après
accidents, beaucoup explicitent, précisent, voire normalisent, certaines règles des conventions,
normalisations qui constituent la base des spécifications, donc de la fabrication puis de
l'approbation des matériels qui y sont soumis.
De telles résolutions sont mentionnées dans les conventions en
"note de bas de page" référencée à la règle.
Les autres résolutions et circulaires
Les Comités peuvent prendre des résolutions sous leur timbre (MSC,
MEPC, ... ), certaines étant destinées à devenir des résolutions de l'Assemblée.
Les sous-comités enfin émettent des circulaires sous leur timbre.
Les cours
L'OMI a également mis au point un certain nombre de cours destinés
à harmoniser la formation de base dans les universités maritimes, telles que celles de MALMö et de
TRIESTE ou dans le cadre de la coopération.
L'OMI et l'application de ses règles
le Port State Control (PSC)
Ainsi qu'il a déjà été dit, l'OMI ne dispose pas de moyens propres
à s'assurer de l'exécution de ses prescriptions.
Si la création du sous-comité sur "l'application des instruments
par l'État du pavillon" (FSI), il y a une dizaine d'années, visait (un peu) à combler cette lacune,
il apparaît que le mieux qu'il ait pu faire ait été de favoriser la mise en place d'accords régionaux
(MOU) visant à faire assumer cette tâche, de façon harmonisée et non discriminatoire, en fait par les
États du port (Port State Control PSC).
Il est vrai que le premier MOU, celui de LA HAYE de 1978, étendu
en 1982 - MOU de PARIS - à la plupart des pays d'Europe du Nord, visait à contrôler dans les ports
concernés, les navires qui, de plus en plus nombreux, passés sous "pavillon de libre immatriculation", commençaient à présenter de sérieuses défaillances techniques, faute de maintenance.
Plusieurs accords de ce type existent maintenant de par le monde,
en MEDITERRANEE, en AMERIQUE du SUD (VINA del MAR), en EXTREME ORIENT (TOKYO),...
Il n'en demeure pas moins qu'il y a toujours un très grand nombre
de navires sous normes pour un certain nombre de raisons, parmi lesquelles :
- Une trop grande habitude de se fier aux certificats internationaux de sécurité délivrés en
vertu des conventions de "visites papier".
- A la superficialité des visites, même quand elles vont au-delà des certificats.
- Aux difficultés pour visiter certaines structures et capacités du fait de l'exploitation du
navire.
- Au manque d'effectifs.
- Au manque de formation des inspecteurs.
- A l'absence de coopération entre inspecteurs de l'État du port et experts des sociétés de
classification.
Conclusion
L'Organisation Maritime Internationale est une organisation
régulatrice, sans moyens de contrôle.
Or, qui dit réglementer dit avoir les moyens de s'assurer que les règles sont (bonnes et) appliquées.
Le Port State Control (PSC) constitue sans doute une bonne
solution mais encore conviendrait-il de s'en assurer.
Il semblerait que l'OMI doive se rapprocher de l'OACI pour voir
quels sont ses moyens d'action dans ce domaine.
Article paru dans la revue "Navigation", volume 50, N°197, janvier 2002, sous la signature de
l'Administrateur Général des Affaires Maritimes J.L. GUIBERT, de l'Académie de Marine, qui nous a
autorisé à le reproduire dans notre revue.