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Vision actuelle du management de la sécurité dans l'industrie maritime.
Page du code ISM Nº 50
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Organisation moderne de la sécurité maritime selon le code ISM en misant sur le management du facteur humain.
Tout d'abord, définition de «management»
C'est un terme anglo-saxon grandement utilisé aujourd'hui et qui se retrouve tout naturellement dans nos dictionnaires ; par exemple : management des activités, écoles de management, management de la sécurité et de la protection de l'environnement.
Management en français a également une définition claire : «ensemble des techniques de direction, d'organisation et de gestion d'une compagnie».
Le terme «gestion» étant lui-même défini comme : administration dans lequel il y a la conduite de l'entreprise y compris la conduite financière.
Clarification
Pour clarifier, dans une industrie internationale où l'anglais domine, il est judicieux d'utiliser «management» pour l'ensemble des activités de la compagnie maritime, alors que le capitaine «commande» le navire et qu'en cas d'évènement il faut «gérer» la crise à bord et à terre.
Cependant, un petit piège : le terme «management» est aussi utilisé pour désigner l'ensemble des directeurs ou «managers», donc pour éviter les confusions, il est conseillé de ne pas utiliser le terme «manager» pour un directeur et donc d'utiliser en anglais le terme CEO (Chief Executive Officer) de préférence à «General Manager» pour la Direction Générale (DG). En français le terme «Direction générale» s'explique de lui-même
Management de la sécurité pour une compagnie de navigation selon le code ISM
Le retour d'expérience du naufrage du HOFE a contraint à l'organisation de la sécurité de l'industrie maritime selon un code, un standard : le code ISM (International Safety Management).
Pratiquement les standards de construction ou d'opérations des navires (SOLAS) étant définis à part, leur organisation a été standardisée d'une manière obligatoire selon le code ISM, et cette organisation s'applique aujourd'hui à presque tout ce qui flotte.
Le code ISM est un code volontairement succinct qui a l'énorme avantage d'avoir tout prévu, ou presque. En effet, que ce soit la sécurité des opérations (navigation, opérations commerciales) comme la sécurité en cas d'urgence, tout est prévu semble-t-il.
Mais la sécurité comportementale reste encore souvent à l'état d'intention dans le code ISM et la gestion du facteur humain en était, en théorie, son principal objectif.
Donc, en plus de la construction du navire lui-même et de son équipement, il faut prévoir trois sécurités en une :
- Sécurité opérationnelle y compris la cyber-securité et la santé/pandémie.
- Sécurité en situation d'urgence.
- Sécurité comportementale des personnes impliquées dans les opérations du navire.
Illustration :
Principe de la sécurité opérationnelle dans un SMS conforme au code ISM.
Dans un système de management de la sécurité, quels sont les éléments qui entrent dans le facteur humain pour la sécurité opérationnelle ?
Organisation générale du navire : Identification, organisation du travail, critères d'intervention humaine.
Connaissance de ce qu'il faut faire : formation, familiarisation et maintien des connaissances.
Evaluation des risques : identification, réflexion et décision avant exécution de mesures de réduction du risque.
Actions planifiées : programme complet ou plan.
Préparation des opérateurs : exercices (avec incidence de la santé et la fatigue du personnel et les conditions locales (état de la mer/travail de nuit).
Aide à la prise de décision : fiches d'intervention/check-lists opérationnelles.
Sécurité immédiate d'exécution : cross-check.
Enregistrements et notifications : PV ou rapports.
Contrôle de fonctionnement par inspections et revues avec publication des résultats.
Analyse des dysfonctionnements pour éviter la récurrence (audit et retour d'expérience).
Quels sont les éléments de facteur humain qui rentrent dans la sécurité en situation d'urgence ?
Identification des situations d'urgence.
Description des situations d'urgence pour chaque navire.
Maintien des équipements d'urgence en état de fonctionnement (incendie et évacuation, back-up techniques des appareils ou systèmes critiques).
Maintien de la compétence : formation continue via exercices et entraînements programmés.
Evaluation de la préparation des équipes à bord et à terre à répondre aux situations d'urgence : audits et/ou exercices d'évaluation.
Retour d'expérience sur situations réelles ou simulées dans le cadre de l'amélioration continue de la préparation de l'équipage à répondre aux situations d'urgence.
Enfin, quels sont les éléments de facteur humain pour la sécurité comportementale
Etat physique des individus à bord (du matelot au capitaine) et à terre (depuis les membres de la cellule de crise jusqu'aux cadres de permanence 24/7) : santé et fatigue.
Etat mental des mêmes individus et plus spécialement à bord (effets de la vie confinée du marin, durée de l'embarquement).
Culture sécurité personnelle de chaque individu (origine, formation) et culture sécurité globale de la compagnie.
Evaluation du niveau qualité du travail en équipe : team-work ou crew resource management (CRM) via les audits internes.
Mais, le code ISM conserve sur ce sujet quelques points faibles.
Le facteur humain dans le code lui-même
Alors qu'un chapitre spécial aurait pu être prévu dans le code, en cherchant bien, on peut néanmoins y trouver quelques références.
Que ce soit dans les objectifs ou dans les exigences on trouvera aussi des références au facteur humain par le management des risques.
En en ce qui concerne la santé, le code est resté très succinct en ne parlant que d'aptitude physique en général.
Les éléments concernant la fatigue due principalement aux conditions de vie à bord (confinement, rythmes, mouvements du navire, vibrations, décalage horaire quasi permanent, solitude familiale) sont relégués dans des circulaires adjacentes plus ou moins obligatoires, ce qui laissent la possibilité à certains pavillons de les oublier complètement.
Quels sont-ils ?
Dans le titre, management comprend «organiser» qui est une base de la gestion du facteur humain : un marin est d'abord formé puis familiarisé au navire et à son travail.
On lui demande ensuite de travailler selon le principe de l'évaluation systématique des risques et de prendre les mesures de réduction ALARP (as low as reasonably possible) : celles du SMS et celles supplémentaires qu'il pourra prendre en fonction de son aptitude personnelle (fatigue/ santé/connaissance).
Il travaille selon un programme 24/7 et une organisation de son activité : nombre limité d'heures de travail jour/nuit suivies d'un repos échelonné sur les 24 heures à la différence de la plupart des travailleurs terrestres.
Pour cela, on lui demande d'être apte physiquement sans plus.
Améliorations possibles
Quelques améliorations ont été apportées depuis la naissance du code, même des notes de bas de page «à titre informel» ont été incluses dans les dernières versions du code.
Solution interédiaire, qui mène certainement plus facilement à un consensus, mais qui laisse le puriste sur sa faim.
Cette solution étant plus susceptible d'être acceptée à l'OMI, notre dernière demande d'amendements au code ISM inclut sous forme de note de bas de page les recommandations sur la fatigue.
Par contre avec l'expérience de la Covid-19, le terme santé/prévention ne peut plus aujourd'hui être laissé de côté.
Proposition : AFCAN «Code ISM 2020»
Fort de l'analyse ci-dessus et d'un retour d'expérience sur les parties trop floues du code ISM, un projet de propositions d'amendement au code ISM est né au sein de l'AFCAN : pourquoi l'AFCAN ? parce que depuis plus de 20 ans une rubrique ISM paraît dans la revue trimestrielle de l'association.
Les adhérents des autres associations d'officiers de la marine marchande comme HYDROS et JEUNE MARINE, intéressés par le sujet peuvent également émettre leur avis via leur site internet.
Détails du projet
Une telle proposition sera donc transmise en temps utile à la direction des affaires maritimes.
Si l'origine est bicéphale AFCAN/HYDROS, la proposition a quelques chances d'être lue d'abord puis peut-être étudiée pour une proposition éventuelle de l'administration au groupe compétent de l'OMI (HTW).
Une telle proposition est concomitante avec une proposition de formation spécifique ISM qui manque beaucoup dans le cursus de nos équipages.
A l'aube d'une révision du code STCW demandée par l'ICS, il nous a donc semblé opportun de faire suivre aussi une proposition d'amendement à la convention et au code STCW pour faire valoir une toute nouvelle formation ISM avec les certificats correspondants. (Voir la page du code ISM N° 49).
Au regard de l'OMI de telles propositions auraient du sens, et avoir du sens, on aime cela à l'OMI.
NB : les textes en français et en anglais des deux propositions se trouvent sur le site www.afcan.org.
Cdt Bertrand APPERRY
AFEXMAR-AFCAN-HYDROS
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