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Les dernières propositions d'AMENDEMENTS au Code ISM
page du Code ISM Nº26
 
Références : Document présenté au MSC 89 à l'OMI par un consortium comprenant l'ensemble des pays de l'Union Européenne et intitulé «Rationalisation du Code ISM et facilitation de son application» (doc 22/9)
  1. Introduction


  2.        Il s'agit de 6 petites modifications qui auraient dû être incluses dans le dernier amendement de 2008 applicable depuis le 1er juillet 2010. Il semble que les modifications proposées aient été prêtes un peu tard pour cela. Bon, vu l'importance des modifications proposées, ce n'est pas très grave finalement !

           Avant de regarder et de commenter ces modifications, il est bon de savoir que les États Européens sont à présent bien impliqués dans l'application du Code ISM y compris pour les navires considérés comme en dehors de la SOLAS. La majorité des marins sont de leur côté à présent bien conscients de l'importance de la gestion de la sécurité et se réjouissent d'entendre l'ensemble des pays Européens clamer d'une seule voix que :

    vu le rôle capital joué par le Code ISM en matière de promotion des objectifs de l'OMI…
    …les administrations du pavillon se doivent de tenter d'en améliorer la mise en œuvre et l'application du code ISM à la lumière de l'expérience acquise. Il faudrait recenser les domaines dans lesquels un manque de clarté risquerait de donner lieu à des divergences d'interprétations et à des difficultés entre les parties qui appliquent le Code ISM. Et y porter remède, si l'on veut atteindre l'objectif principal qui consiste à promouvoir une culture axée sur la sécurité, non seulement à bord des navires, mais aussi au sein de la compagnie. Le Code ISM et ses directives connexes constituent un élément fondamental qui permet de répondre de manière constructive aux préoccupations en matière de sécurité suscitées par les erreurs humaines.


           Bigre ! Pour un vieil habitué des réunions ISM à l'OMI (de 95 à 2005 quand même) je manque de tomber sur le cul ! Bon Dieu on nous les a changé !… me souviens encore des nombreuses sessions du groupe de travail sur le facteur humain où j'étais le seul Français… donc accompagné seulement … de mon intime conviction !

           Les membres du consortium regrettent que la présente soumission n'ait été faite qu'après la dernière analyse majeure du Code ISM ! «It is regrettable that this submission has only become available following the finalization of the last review at IMO». Bon on ne va pas pleurer, au contraire, tout cela est bon même, si c'est encore insuffisant ! Mais j'enrage toujours de constater que l'avis des marins est toujours aussi peu recherché. En effet, je ne me souviens pas d'avoir vu une demande pour que l'AFCAN et ses adhérents participent au groupe de travail Européen sur le sujet !

           En définitive ces amendements au Code ISM et aux directives (guidelines) connexes devraient être approuvés vers 2013 au mieux.

  3. Qu'en est-il précisément ?


    1. Première proposition


    2. «Il est proposé d'apporter des amendements au Code international de gestion de la sécurité (Code ISM). Les propositions d'amendements visent à apporter des précisions sur les responsabilités qui incombent à la compagnie en cas de délégation des tâches ayant trait au système de gestion de la sécurité, concernent les ressources et le personnel et visent à étendre l'application d'un certificat de gestion de la sécurité provisoire ainsi qu'à insérer des notes de bas de page renvoyant aux Directives de l'OMI connexes».
      En gros, 4 directions pour cette première proposition d'amendements au Code :
      • Les responsabilités de la compagnie en charge de la conformité avec le Code ISM
      • Les ressources et le personnel;
      • La certification provisoire
      • Les « notes de bas de pages » reportant aux directives OMI adéquates

      Commentaires :
      Responsabilités du SMS :
             D'un côté on apprend que certaines compagnies délèguent tout ou partie du management de la sécurité à des entités spécialisées. C'était à prévoir et à peu près partout cela est considéré comme logique notamment depuis l'arrivée du Code ISPS (revoir les quelques pages du Code ISPS de votre Afcan Informations)*

             D'autre part, le document d'information nous apprend, avec même un certain humour que certaines compagnies qui ont des difficultés pour obtenir ou maintenir le DOC, font appel à des sous-traitants pour externaliser certaines exigences du Code ISM. On n'est pas contre… lorsqu'il est fait appel à des sociétés sous-traitantes compétentes ! Mais … lorsque le sous-traitant «re-sous-traite» à la première compagnie – c'est-à-dire son client - certains éléments «sensibles» du SMS (c'est-à-dire où ils peuvent «rogner» le budget comme le «crewing» ou la maintenance) on saute au plafond ! L'imagination de nos superintendants, qui sont presque toujours d'anciens marins quand même, est extraordinaire !

             Donc l'ensemble des pays de l'UE n'est pas contre ce système de sous-traitance qui a permis à certaines compagnies dont le DOC a été retiré (ça doit être quand même extrêmement rare !) de déplacer leur flotte sous un autre SMS valide lui. Finalement la sécurité de cette flotte requiert que le sous-traitant prenant en charge le SMS, puisse vérifier la stricte application des exigences du Code - y compris celles signalées plus haut - au besoin par des vérifications et audits correspondants. De plus un accord devra être signé entre ces parties pour assurer que les ressources nécessaires par la compagnie «mère» seront assurées.

      En gros : La compagnie sous-traitante assurant le fonctionnement du SMS peut re-sous-traiter à la « compagnie mère » les parties sensibles budgétairement mais devra bien la surveiller ! En voilà une idée qu'elle est bonne et … totalement irréalisable d'une manière efficiente ! Y aurait-il des gens dupes à ce point … alors qu'en cas de conflit justement dû à ces parties sensibles, une clause de fin de contrat pourrait être appliquée au sous-traitant ? Ne s'agit-il pas d'une arnaque bien caractérisée ce coup-ci : on me retire le DOC qu'à cela ne tienne, je passe ma flotte concernée sous un autre DOC !

             Personnellement, en tant qu'adepte de l'auto contrôle, j'avais toujours pensé que la confiance réciproque ne pouvait malheureusement pas s'appliquer correctement dans notre industrie – ni dans d'autres d'ailleurs- et c'est d'ailleurs pour cela qu'on a inventé la «certification» par une tierce partie ! Ici, l'auto contrôle ne fait que se compliquer, au risque de noyer encore un peu plus le contrôle externe du certificateur !

      NB : L'ISO 9001, version 2008 ne permet plus une telle délégation, il doit y avoir quand même une bonne raison !

      Ressources et personnel
             Il est proposé que la compagnie évalue le besoin réel en personnel embarqué pour assurer sécurité et sûreté mais aussi l'efficience des opérations du navire conformément à la Règle 2.7 de la Convention MLC 2006.

      Commentaires :
      Là, on ne peut qu'approuver et oublier…les fameux « effectifs minimum de sécurité » si chers à nos armateurs ! La compagnie doit à présent inclure dans son SMS une réelle évaluation de l'effectif pour un navire, une ligne et des opérations données. On apprécie mais on restera vigilant !

      Les certificats ISM provisoires
             Il est demandé qu'une procédure de reprise de l'application d'un SMS sur un navire lors de son réarmement après un désarmement conséquent soit prévue et comprenne un audit externe si nécessaire. Et si le SMC devient caduc pendant un désarmement, qu'un SMC provisoire soit prévu.

      Commentaires :
      On approuve bien sûr !
      Pour les notes de bas de page, c'est OK bien sûr car ce sont des aides mémoire efficaces.

    3. Deuxième proposition


    4.        Il est proposé d'apporter des amendements particuliers à la Résolution IMO A.1022, qui, pour les administrations du pavillon ou leurs représentants, accompagne le Code ISM («Directives révisées sur l'application du Code ISM par les administrations»). Les propositions d'amendements visent à apporter des précisions sur la portée et l'application des vérifications provisoires, initiales et supplémentaires, et sur les responsabilités qui incombent à la compagnie, en particulier en cas de délégation de certaines tâches ayant trait au système de gestion de la sécurité à des sous-traitants.

      Commentaires :
      Les propositions des pays membres de l'UE sont pleines de bon sens, exceptée peut-être toujours la fameuse limite des 3 mois pour les actions correctives qui n'a aucune justification précise et qui parfois est contraire à la réalité du shipping. En effet, parfois des actions correctives ne sont possibles qu'en arrêt technique … qui peut avoir été programmé pour une date à plus de 3 mois !
             Enfin lorsqu'on présente une proposition d'amendement sensé clarifier un texte, on ne se permet pas de laisser une partie dans le vague comme «des manques de conformité répétées …. Ref 3.14.3» ; répétées … combien de fois ???

      En gros : cette proposition est très technique et très sensée mais il est amusant de constater que finalement avec la tendance actuelle des administrations maritimes de tout déléguer aux sociétés de classification, elle s'adresse donc plus aux RO (organisation reconnues) qui agissent au nom du pavillon. On ne peut qu'approuver nos délégations à l'OMI qui forcent le passage dans cette perspective. D'autres passages en force viendront encore, soyez-en sûr, et on ne peut qu'approuver.

    5. 3ème proposition


    6.        Il est proposé d'apporter des amendements à la circulaire MSC-MEPC.7/Circ.5, «Directives pour l'application opérationnelle du Code international de gestion de la sécurité (Code ISM) par les compagnies». Les propositions d'amendements portent sur quatre questions : le champ d'application des activités de l'auditeur interne, ses qualifications, les ressources et le personnel, ainsi que les responsabilités qui incombent au titulaire du DOC.

      Commentaires :
             Les quelques amendements proposés sont pertinents mais dans l'exposé de ses motivations le consortium EU s'est quand même empêtré dans ce que j'appellerais l'étude de l'indépendance de l'auditeur interne !
             En effet, il est très courant que la DPA et ses adjoints effectuent les audits internes à bord des navires car ils sont chargés de la surveillance des aspects sécurité et prévention de la pollution des opérations de chaque navire … tout en restant à terre ! Il est donc normal que, même en déléguant cette surveillance au Capitaine du navire, elle puisse s'en assurer elle-même via les enregistrements mais aussi par un audit effectif à bord !
             L'indépendance des auditeurs internes telle que voulue par le Code ISM est quand même un peu mise à mal dans ce cas-là et même si le consortium ajoute que les audits devraient être faits par un adjoint à la DPA… on reste dans la même ambiguïté. Par contre, proposer que l'audit interne soit effectué par un contractant extérieur est fort judicieux. Ceci se pratique de plus en plus. Pensez-donc, les coûts sont à peu près équivalents mais les bénéfices attendus sont augmentés de la transmission d'une certaine expertise (benchmarking) souvent internationale, et surtout, permet la mise sur la table des «sujets qui fâchent», le consultant externe étant payé pour cela ! Croyez-moi, nul n'est à l'aise pour dire à son patron que cela ne va pas fort…. tandis qu'en faisant cela, l'auditeur externe ne fait finalement que son boulot !

      En gros : on peut mieux faire dans le secteur de l'indépendance de l'auditeur interne. Ce sujet est important car comme les initiateurs du Code ISM, je reste persuadé que les résultats du Code ISM passent par une bonne gestion interne plutôt que sur les audits solennels du pavillon ou de ses représentants !

    7. 4ème proposition


    8.        Il est proposé d'apporter des amendements particuliers aux modules III et IV de la Résolution A.852(20), intitulée "Directives relatives à la structure d'un système intégré de planification des situations d'urgence à bord". Les propositions d'amendements, qui sont fondées sur la Résolution A.852(20), visent à aider les compagnies à élaborer des plans d'urgence de bord.

      Commentaires :
      Nous adhérons totalement à cette mise à jour de la Résolution A 852 qui reste notre référence quant à la mise en place du sous-système de planification du management des situations d'urgence dans tout SMS digne de ce nom.

      NB : un rappel quand même, j'ai déjà regretté dans cette revue que l'obligation de description des situations d'urgence ait disparu du Code ISM (§ 8.1). En effet, quoi de plus intéressant que d'utiliser notre expérience pour les décrire et ensuite imaginer le scénario de réponse … en utilisant cette importante partie de notre cerveau si peu utilisée qui s'appelle l'imagination !

    9. 5ème proposition


    10.        Il est proposé d'élaborer une nouvelle recommandation, intitulée "réactivation de la validité du certificat de gestion de la sécurité (SMC) à la suite de l'interruption de l'exploitation du SMS en cas de désarmement du navire pendant une période donnée". Le champ d'application de la vérification de la réactivation dépend de l'ampleur et du type de désarmement ("à froid" ou "à chaud") et garantit que les compagnies prennent les mesures appropriées pour préserver ou réactiver le système de gestion de la sécurité du navire.
             Cette nouvelle proposition, fondée sur différentes directives existantes des sociétés de classification applicables au désarmement des navires, vise à établir une série commune de directives lors de la remise en service.

      Commentaires :
      Cette proposition tombe sous le sens et semble adéquate. Ces directives devraient être publiées par l'OMI sous forme de Résolution ou de circulaire MSC/MEPC.

    11. 6ème proposition


    12. Il est proposé d'actualiser régulièrement la circulaire MSC.1/Circ.1371, à savoir, la liste des prescriptions et recommandations de l'OMI relatives à la sécurité s'appliquant à tous les navires et à certains types de navires.
             Il est proposé que le Secrétariat de l'OMI actualise régulièrement cette circulaire afin que les compagnies et les administrations disposent d'un document de référence actualisé qui énoncerait les prescriptions d'une part et les recommandations d'autre part, afin d'aider la veille réglementaire des compagnies de navigation dans leur démarche de conformité au fameux § 1.2.3 du Code ISM.

      Commentaires : En attendant que la base de données GISIS soit opérationnelle sur ces listes, le consortium a tout à fait raison de demander au Secrétariat OMI d'assurer la mise à jour continue de la circulaire MSC 1371.


  4. En conclusion


  5. On ne peut qu'approuver ces propositions d'amendements avec toutes les nuances exposées ci-dessus. Pour les spécialistes c'est une bonne initiative mais qui ne résout pas encore toutes les ambiguïtés du Code. Enfin, cette initiative des pays Européens est assez surprenante quand on voit la tendance générale à «privatiser» à tout va et confier inexorablement la vérification de la conformité au Code ISM à des sociétés privées. Peut-être finalement que c'est normal de forcer sur le cadre réglementaire avant de laisser la barre à d'autres !


    COMPLÉMENT à la page du Code ISM N° 26

           Tout en rappelant que nos administrations sont aussi en charge du PSC (Port State Control), d'aucuns murmurent que là aussi un passage au privé pourrait s'accélérer.

           Pendant ce temps, le PARIS MOU, qui comprend toutes les nations maritimes Européennes a édité récemment des directives sur la vérification des SMS au cours des visites PSC. Ces directives sont en train d'évoluer et se concentrent enfin d'une manière beaucoup plus professionnelle sur la conformité au Code ISM avec une possibilité de détention - terreur des armateurs - du navire au port!

           Rassurez-vous, avant d'arrêter un navire pour un SMS bancal, il y aura quand même une obligation d'audit selon la gravité de la non-conformité ! En fait, à chaque inspection, une seule défectuosité liée à l'application du Code ISM sera notifiée et enregistrée au MOU. Mais lorsqu'un navire est retenu et que la retenue est liée au système de gestion de la sécurité, le fonctionnaire chargé du contrôle par l'État du port exigera un audit externe. Lorsqu'un navire présente un certain nombre de défectuosités mais qu'il n'est pas « retenu », le fonctionnaire peut quand même considérer que le système de gestion de la sécurité n'est pas complètement efficace et exiger seulement un audit interne de la compagnie. Lorsqu'une nouvelle inspection est réalisée, l'officier chargé de contrôle par l'État du port n'évaluera pas le rapport d'audit.

           Tout ceci est fort intéressant, et, tout en mettant en lumière - par défaut - l'importance de l'audit interne, laisse quand même la validité du SMC entre les mains du certificateur et conserve une certaine confidentialité au rapport d'audit.

           Cette initiative du PARIS MOU ne peut que nous réconforter tant que ce sont des fonctionnaires de l'État du port qui effectuent les PSC. Lorsque les ROs vont arriver sur ce marché, assisterons-nous à une guerre interne entre les membres de l'IACS et les autres ou entre les membres de l'IACS eux-mêmes ? D'autre part, la confidentialité du rapport d'audit (interne ou externe) est mise en lumière ici et doit nous interpeller : la confidentialité dans le Code ISM existe-t-elle et si oui, qu'en est-il exactement ? (Je vous prépare un article sur ce sujet assez excitant je l'avoue)

           Mais, ce n'est pas fini, vous aller rire, cette initiative de visite ISM du PARIS MOU n'a pas été du tout du goût de l'IACS. Un document récent publié en février cette année (FSI 20/6/9) en vue du prochain sous-comité FSI, exprime le doute de l'IACS sur le bien-fondé de cette nouveauté et à mon sens, met en doute la compétence de nos PSCO ! En effet, l'IACS considère que ces directives attaquent les administrations et les RO qui agissent en leur nom ! Y aurait-il un peu de paranoïa de leur côté ? Personnellement, je trouve ces directives très bien et surtout bien dosées dans les mesures coercitives ! Qu'est-ce qu'il lui prend à l'IACS ? Serait-ce une réponse à une entrée du PSC dans un domaine qu'elle considère comme une chasse gardée ? C'est idiot car quoique la RO fasse ou délivre, elle ne le fait qu'au nom du pavillon ! Alors pourquoi mettre en doute la compétence de nos PSCO ? Il est un fait que cette compétence en ISM s'améliore de jour en jour chez nos fonctionnaires en charge du PSC. Il faut donc rester confiant même s'il est vrai qu'on est parti de zéro ! A ma connaissance d'ailleurs, les PSCO sont souvent formés en ISM par les ROs elles-mêmes, alors !

           Enfin et pour conclure, y aurait-il une relation entre ces deux initiatives (clarification des exigences du Code ISM d'un côté et nouveau pouvoir du PSC sur la gestion de la sécurité du navire de l'autre) : l'ISM aurait-il enfin gagné ses galons, allons-nous vers plus d'ISM dans la vie des tous les jours des navires ? L'ISM a quand même bientôt 20 ans et, même si notre industrie a toujours été un peu lente à réagir, il serait temps que le management de la sécurité des navires trouve enfin sa vraie place.
Cdt Bertrand APPERRY
Consultant ISM - mars 2012
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