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Code I.S.M. : Vers le management global de la sécurité dans l'industrie maritime :
le système E3S-2005
page Nº17
Généralités
Conséquence de la prise en compte des accidents spectaculaires des années 70-90, la gestion
de la sécurité est entrée en force dans notre industrie.
Éléments ô combien à risques, les navires ont été les premiers concernés et c'est aujourd'hui
au tour des ports.
Pour gérer pleinement et équitablement un système, nous avons pris l'habitude nécessaire de
nous baser sur une norme, une spécification précise ou un code de préférence international(1)
encore appelé référentiel.Alors que pour gérer la qualité ou la protection de l'environnement, nous avons été bien servis
depuis un moment, pour manager la sécurité il n'y a finalement que peu de référentiels.
Cela est assez étrange car, logiquement, avant de se préoccuper de la satisfaction du client où
de la protection de notre environnement, aussi importante soit-elle, on aurait dû normalement
commencer par mettre en place des normes de management de la sécurité des travailleurs
basées sur la prévention des accidents.
En effet une entreprise avant de prétendre à un label de qualité, devrait prendre en compte la
sécurité de son personnel d'une manière logique, complète et vérifiable c-a-d via un système
de management de la sécurité et de la santé au travail.
Je ne dis pas que rien n'était fait pour la sécurité des travailleurs loin de là : les législations
nationales, bien que très différents d'un pays à l'autre, existaient ; cependant le besoin d'une
norme internationale se fait aujourd'hui bien sentir.
Comme souvent dans ces domaines ce sont encore les anglo-saxons et plus spécialement les
britanniques, ne nous en déplaise, qui nous montrent encore la voie !
Pour ce qui est de l'industrie maritime, les initiatives sont toujours issues de l'analyse de
catastrophes maritimes à commencer par le fameux code ISM de 1993.
Le code ISM
Suite à l'accident du "HERALD OF FREE INTERPRISE", contraintes et forcées, les
compagnies maritimes se sont mises à la gestion de la sécurité via un code de management
élaboré par les gouvernements membres de l'OMI : le code ISM (International Safety
Management).
Code de gestion de la sécurité mais aussi de la « protection de notre environnement et en
particulier l'environnement marin » (objectifs du code § 1.2.1) cruellement attaqué lors de
chaque accident.
Malgré son application parfois virtuelle, en 10 ans le code ISM a prouvé son efficacité et
surtout sa nécessité. Un bilan est en cours à l'OMI, il est certain qu'il confirmera que les plus
nuls des armateurs ont disparus et que les survivants continuent à se mettre en conformité
pour le plus grand bien de leurs assureurs peut-être mais surtout pour le plus grand bien de
leurs équipages et de la mer jolie.
Créé de toutes pièces parce qu'il n'y avait rien ou pas grand-chose d'international et
particulièrement bien fait, le code ISM pourrait s'adapter à d'autres parties de notre industrie.
Cette tentation nous est venue à tous (IPSEM du BV et ISM-Port de votre serviteur et
quelques amis). Malheureusement le succès n'a pas été au rendez-vous, car plus encore que
les armateurs, les ports ne veulent faire « que ce qui est obligatoire » (belle phrase armatoriale
que j'ai moi-même entendue dans les salons feutrés de l'ex CCAF)
Et puis, et puis….. enfin des initiatives se font jour.
Suite à l'analyse de la gestion des catastrophes subies par certains grands ports :
-
Depuis l'an 2000, la Grande Bretagne impose à tous les ports du Royaume-Uni le Port Maritime Safety Code
- Le BIT (Bureau International du Travail) en 2004 en association avec l'OMI et les syndicats internationaux a lancé le code
de conduite de la « Sécurité et Santé dans les ports »
C'est, à entendre certains présidents de conseil d'administration de Ports Autonomes, ... une
petite révolution qui s'étend et gagne tous les ports Européens et limitrophes pour … devenir
rapidement obligatoire tout au moins au sein de l'Union Européenne.
Sécurité et Santé dans les ports
De quoi s'agit-il ?
Il s'agit tout simplement d'appliquer au monde portuaire des méthodes de management
modernes internationales… déjà appliquées presque partout ailleurs.
Si la sécurité de la navigation revient à l'OMI par mandat de l'ONU, la sécurité dans les ports
revient au BIT (ou ILO).
Depuis longtemps des recommandations ont été publiées par ce bureau bien connu des
travailleurs mondiaux. Aujourd'hui le résultat des travaux du commission tri- partite ILO-
OMI- Syndicats viennent d'être publiés(2) : « Recueil de règles pratiques sur la sécurité et la
santé dans les ports » qui remplace les guides précédents qui dataient des années 70/80.
Ce « code of practice » à l'avantage de faire le tour de la question (560 pages !) et une des
solutions préconisées pour l'application est d'utiliser un système de management classique
basé sur des principes directeurs élaborés par le BIT lui-même (Spécification ILO- OSH 2001
-Occupational Safety and Health)
Donc un code de « Sécurité et Santé » au travail en complément des autres secteurs déjà
pourvus comme la qualité (ISO 9001), la sûreté (ISPS) et la protection de l'environnement
(ISO 14001) !
Encore une fois pour gérer cette partie importante de nos activités nous avons à notre
disposition un Système de management.
Un système de management est indispensable !
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Un système de management conforme à ILO- OSH 2001est un ensemble cohérent qui, tout
simplement, structure l'ensemble des activités menant à la prévention des accidents : après
avoir décidé d'une politique et défini des objectifs sécurité, une planification des activités
correspondantes est élaborée. Elle comprend l'organisation, la définition des responsabilités,
la formation et la communication internes et enfin les vérifications et analyses internes pour
une amélioration continue.
Les éléments cités se retrouvent dans tout système de management que ce soit de la qualité,
de l'environnement ou de la sûreté : les systèmes sont tous bâtis à peu près de la même
manière… aussi la tentation est grande de vouloir tout regrouper sous un seul et même
système, un système global !
Un système global est-il possible ?
La solution globale d'un système de management unique est attirante et la profession y a bien
sûr déjà pensé et continue d'y penser.
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On peut aujourd'hui vous proposer un système intégré, par exemple ISO 9001, ISO 14001 et
ILO-OSH 2001, mais il s'agit trop souvent encore de relier entre eux ces systèmes et de bâtir
un ensemble arborescent qui se tienne … plus ou moins. Tous les organismes spécialisés que
nous connaissons peuvent vous proposer un système intégré Sécurité /qualité/ environnement
avec quand même quelques conditions particulières :
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Il s'agit d'un empilement des certifications : d'où un coût conséquent
-
Pas question d'intégrer une partie certifiée par un autre organisme (on est regroupés au sein d'associations mais on reste
concurrents !)
-
La sûreté parait leur poser problème
Et la sûreté dans tout cela ?
En effet, nos organismes de certification sont malgré tout assez libres dans leur activités et
même si les référentiels sont précis, un arrangement est toujours possible … nous sommes
entre clients et fournisseurs que diable !
Dans la sûreté par contre ces organismes sont moins libres car dans le code international
ISPS, qui s'applique aux installations portuaires (et aux ports Européens), la démarche de
certification de conformité passe obligatoirement par une approbation des Plans de Sûreté par
le gouvernement du port lui-même (le préfet chez nous) !
Enfin, la confidentialité particulière des documents rattachés à l'ISPS semble aussi leur poser
quelques problèmes.
En conclusion, vous avez théoriquement la possibilité d'avoir un empilement de systèmes
intégrés et tous « certifiables » (c-a-d conformes à un référentiel)… qui vous amènera vers un
empilement de certificats … qui risque de vous amener également vers un empilement de
factures !
En effet comment certifier un système unique si le référentiel n'existe pas ?
La certification est-elle indispensable ?
Assurance de conformité à un référentiel choisi et ensuite assurance d'un fonctionnement
minimum du système, la certification et son maintien est une poule aux œufs d'or qui a encore
quelques beaux jours devant elle !
Les organismes certificateurs sont théoriquement des organismes reconnus, intègres et tout et
tout… mais pour certains il semble que la réalité soit tout autre !
En effet plus ça va, moins les grands donneurs d'ordres exigent telle ou telle certification lors
de leur appels d'offre… ils préfèrent vérifier par eux-mêmes la « réalité » des certificats que
leurs futurs sous-traitants ou associés brandissent comme des sésames !
Le donneur d'ordre est le client… il est donc le roi qui … est parfois un peu lassé d'avoir un
peu trop fait confiance à un beau certificat délivré par un « organisme reconnu » de renommée
mondiale … mais qui doit quand même vivre car la concurrence est rude !
Pour parler vrai, l'arrivée sur le marché d'organismes de certification « bidons » a grandement
faussé le marché. Le client aujourd'hui est méfiant et, lorsqu'il en a les moyens, il décide lui-
même de votre éligibilité, au niveau management qualité et sécurité, qu'après sa propre
analyse (audits) que vous ayez des certificats ou pas ! Le dernier appel d'offre auquel j'ai
assisté exigeait un management de la sécurité, de la santé et de l'environnement répondant à
ses propres critères mais ne requérait aucun certificat … leur audit, d'ailleurs prévu dans leur
propre système, était seul déterminant !.... Malheur ! (dans ces cas là tous les patrons sautent
au plafond) tout cet argent peut-être dépensé pour rien ?
Non bien sûr, la préparation à une certification quelle qu'elle soit est l'élément le plus
important du processus… mais aussi le moins lucratif pour les organismes spécialisés… on ne
prépare qu'une fois, mais on certifie ou on renouvelle régulièrement !
Néanmoins le logo « certifié ISO xxxxx par untel » a encore son effet publicitaire … la
certification n'est donc pas encore morte !
Autre problème, parmi l'existant, certains certificats sont obligatoires, d'autres non et enfin
d'autres exigences pointent leur nez : les normes sociales et celles du développement
durable !
Cela fait beaucoup vous ne trouvez pas ?
Les systèmes créés pour répondre aux exigences sont tous bâtis à peu près de la même
manière : ne pourrait-on simplifier tout cela, par exemple créer un référentiel global unique
adaptable où seules les parties obligatoires feraient l'objet d'une certification officielle !
Un système unique est-il donc possible ?
Le système de Management E3S-2005
Marque récemment déposée, le système de management E3S-2005 (Environnement, Sécurité
et santé, Sûreté et Satisfaction du client en français et Environment, Safety, Security and
customer's Satisfaction en anglais) se veut une simple spécification originale ambitieuse de
prévention des accidents via le management des ressources humaines et techniques dans un
système logique global. Le système est applicable à l'industrie maritime tout d'abord et en
premier lieu au ports, et ensuite… au reste de l'industrie pourquoi pas ?
Il serait évidemment trop long de le décrire ici, mais il faut savoir que le système E3S reprend
sous une structure unique tous les éléments semblables des différents référentiels et présente
les autres en parallèle.
Les avantages sont importants :
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Une entité de gestion unique avec un responsable désigné assisté dans chacun des secteurs de management
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Une démarche d'évaluation globale des risques
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Des objectifs particuliers à chaque secteur
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Une documentation globale cohérente, où celle nécessaire aux certifications obligatoires est intégrée
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Une familiarisation et une formation globale du personnel
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Une gestion globale des audits et revues de direction
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Une amélioration continue globale
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Pas de certification nécessaire
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Un coût global divisé par trois !
Les inconvénients sont limités à la nouveauté et peut-être à l'abandon progressif des
certifications déjà acquises.
Une telle démarche devrait intéresser les ports où rien n'existe encore vraiment, en attendant
que les autres, lassés des certifications en cascade, se décident un jour !
(1) Le domaine de la sécurité est aujourd'hui tout aussi international que notre activité
commerciale
(2) Disponible sur www.ilo.org
Cdt B. APPERRY
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