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En effet, la simple photographie d'un rejet à la mer ne suffit pas à établir l'existence d'une infraction, car il peut s'agir
tout simplement de l'évacuation du circuit de refroidissement, ou d'un exercice de la lance à incendie. Quant à la photographie d'un yacht de luxe derrière lequel se trouvent des traces suspectes, il est évident qu'elle ne suffit pas pour affirmer que le dégazage de la part de ce navire aurait été volontaire. La photographie même " corroborée " par un procès verbal, même commentée par un expert, ne peut absolument pas suffire à dissiper le doute. Une fois de plus, pourrait-on aujourd'hui, sans susciter un scandale, condamner quiconque sur la base de la photographie d'une tache rouge, accompagnée d'un procès verbal commenté par un expert qui viendrait dire que la tache rouge n'est pas de la peinture ni du sang de poulet mais bien sur la foi de la seule observation visuelle, du sang humain. C'est évidemment impensable. Le prélèvement de la substance de couleur rouge est évidemment indispensable pour que l'on puisse parler de sang. II n'existe aucune raison d'agir différemment en matière de pollution. Il faut d'abord s'assurer que la pollution existe. Les prélèvements en mer paraissent donc bien nécessaires, de même que les prélèvements à bord du navire. La nécessité de procéder à des prélèvements n'a rien d'extraordinaire. Elle résulte de la simple lecture du " Recueil des preuves concernant les rejets en provenance des navires " publié en application de l'accord de Bonn de 1993. Citons ce texte fondamental : " Lorsqu'il y a incertitude quant à la présence d'hydrocarbures à la surface de l'eau, échantillonner l'eau polluée est un moyen de lever le doute. Si des traces d'hydrocarbures déversés restent à bord du navire suspecté, des comparaisons d'échantillons d'hydrocarbures relevés à bord du navire et dans la nappe ou dans la Zone contaminée peuvent aider à l'identification. Diverses techniques peuvent être utilisées. Le couplage chromatographie en phase gazeuse l spectrométrie de masse (CG/SM) utilisé actuellement est à même de fournir une véritable « empreinte digitale », caractéristique de l'hydrocarbure analysé ". |
Il en est d'autant plus ainsi que les zones surveillées sont des lieux de passage très fréquentés, de jour comme de nuit, que les rejets volontaires ont souvent lieu la nuit... L'innocent qui passe le jour suivant ne doit pas être accusé sur la base d'une simple apparence.
- d'une absence d'apparence de pollution devant le navire
- " d'un reflet continu... après le passage du navire ", pour l'identifier comme étant le pollueur.
Bernard Bouloc Professeur à l'Université de Paris - 1 (Panthéon-Sorbonne) |